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11 mars 2016 5 11 /03 /mars /2016 11:22

11 Mars 2016

En France, la production électronucléaire est sensiblement égale à la consommation d'électricité finale.

Alors, pourquoi "seulement" 75% de nucléaire dans le mix électrique ?

Cette apparente anomalie est due aux fluctuations importantes de la demande de puissance de la France.

En effet, la demande intérieure fluctue entre 40 GW (GigaWatts) et 100 GW selon la saison, l'heure, et la météo, alors que la puissance électronucléaire disponible maximale est plafonnée à 63,2 GW.

Lorsque la demande intérieure excède 63,2 GW, il faut faire appel à des moyens de production supplémentaires, qui ne sont pas nucléaires, ou importer de l'électricité; par contre, lorsque la demande est inférieure à 63,2 GW, il faut exporter la production nucléaire excédentaire car on ne sait pas la stocker (Les STEP existantes n'ont pas la capacité nécessaire).

C'est pourquoi la part effective du nucléaire dans la consommation intérieure est "seulement" de 75%.

Si ces fluctuations de demande interne pouvaient être lissées, le nucléaire existant serait alors capable de fournir 100% des besoins, soit 470 TWh environ.

L'objectif du programme "Smart Grid", dont le compteur Linky est le premier maillon, est précisément de lisser la demande de puissance pour en limiter les fluctuations.

Lorsque ce programme sera opérationnel ( Il y a 35 millions de compteurs à installer), le nucléaire pourra alors fournir non pas 75% de la demande, mais 80 ou 85%, voire davantage, et ceci sans augmenter la puissance installée.

Ceci n'est évidemment pas du goût des anti nucléaire, à qui le Gouvernement a promis une réduction de la part de cette technologie à 50% dans le mix électrique, sans cependant préciser l'échéance.

Mais alors, que faut-il croire, 50% ou 85% ?

L'équation est schizophrénique:

Si l'on garde le nucléaire à sa puissance actuelle de 63,2 GW, la mise en œuvre du smart grid conduira à une part électronucléaire plus élevée qu'aujourd'hui, sans qu'il soit nécessaire d'augmenter la puissance installée du parc.

C'est évidemment le souhait des partisans de cette technologie, qui ont défendu ( et obtenu) le principe du maintien de la puissance à sa valeur actuelle de 63,2 GW.

Dans ce cas bien sûr il faudra poursuivre les travaux de mise à nivaux du parc existant (Grand carénage) et la construction des EPR prévus pour remplacer les centrales REP les plus anciennes, dont le démantèlement sera aussitôt entrepris comme prévu dans la procédure légale.

Si au contraire on décide un retrait du nucléaire, il faudra démarrer un programme de substitution basé sur les énergies renouvelables et incluant un programme de construction d'installations de stockage d'énergie pour compenser l'intermittence de l'éolien et du solaire, qui sont appelés à fournir plus de 60% de la consommation électrique.

Parallèlement à ces travaux, il faudra financer le démantèlement du parc nucléaire existant, et mettre un terme aux développements de nouveaux réacteurs.

Dans les deux cas il faudra se dem… avec les déchets.

Une éventuelle décision de retrait du nucléaire ne saurait se satisfaire d'une solution mi-figue mi-raisin.

Si la décision de retrait est motivée par la volonté d'épargner aux populations européennes le risque d'une catastrophe majeure, alors il faut tout arrêter, et dans des délais le plus court possible, de l'ordre d'une décennie.

Se contenter d'arrêter vingt réacteurs et en conserver trente-huit en activité serait dépourvu de sens. Le risque ne serait pas significativement réduit pour autant.

D'autre part, lancer le démantèlement de cinquante-huit réacteurs quasi simultanément est une entreprise surhumaine, eu égard au manque d'expérience ( et au coût).

Il est important de rappeler qu'il n'y a pas d'exemple dans le monde d'un seul réacteur entièrement démantelé jusqu'au niveau de l'herbe.

Il n'aura échappé à personne que, aujourd'hui, le Gouvernement n'a pas encore fait de choix.

La promesse de réduire à 50% la part du nucléaire dans le mix électrique est absolument fantaisiste, dès lors que l'on annonce dans le même temps que l'on maintient la puissance du parc nucléaire à 63,2 GW.

Evoquer un éventuel retrait du nucléaire n'a de sens que si l'on peut justifier de l'existence de moyens de production de remplacement, si possible évidemment avec des énergies renouvelables.

Aujourd'hui, le seul programme conséquent susceptible d'être appelé à remplir ce rôle est le programme de parcs éoliens offshore de la côte atlantique.

Un premier appel d'offres (2012) a permis de démarrer quatre parcs d'une puissance totale installée de 1 928 MW, dont le raccordement est prévu de 2 018 à 2 020.

Un deuxième appel d'offre (2 014) concerne deux autres parcs offshore d'une puissance totale de 992 MW, avec raccordement en 2 023.

Le facteur de charge estimé pour ces parcs est de 35%, ce qui correspond à une production annuelle de 6,7 TWh pour le premier, et 3 TWh pour le second.

Par comparaison, un seul des réacteurs REP de la première génération produit annuellement environ 7 TWh, soit 14 TWh pour la centrale de Fessenheim dont l'arrêt est en question ( Deux réacteurs).

Donc, la totalité de la future production des six parcs éoliens offshore en cours de construction ne suffirait même pas à compenser l'arrêt de la centrale de Fessenheim.

Et il ne s'agit que de deux réacteurs de puissance "réduite" de 900 MW et dont le facteur de charge est peu élevé (85%).

Et de plus, la production éolienne offshore est intermittente puisque soumise au régime des vents. Elle ne peut donc contribuer au bilan énergétique global que si, et seulement si, elle peut s'adosser à des moyens de relève de l'intermittence dédiés.

Inutile de préciser que ces moyens n'existent pas et qu'ils n'ont fait l'objet d'aucun appel d'offres à ce jour.

(Bien que l'absence de moyens de compensation de l'intermittence soit un obstacle dirimant au déploiement de l'éolien et du solaire, ce problème ne semble empêcher personne de dormir, ce qui pourrait prouver le peu d'intérêt réel porté par nos responsables aux énergies renouvelables. Mais, est-ce bien une surprise ?).

L'éventualité d'une décision d'arrêt immédiat d'un ou plusieurs réacteurs nucléaires se traduirait donc dans l'heure qui suit par un déficit de puissance électrique qui ne pourrait être compensé que par des importations et/ou l'augmentation de l'activité des moyens thermiques existants, qui sont eux-mêmes limités.

( C'est pourquoi il est nécessaire d'attendre l'entrée en production de l'EPR de Flamanville avant de songer à arrêter Fessenheim).

D'autre part, et selon le nombre de réacteurs arrêtés, il sera nécessaire de lancer rapidement la construction d'un nombre équivalent de centrales thermiques à Gaz puisque aucun moyen de production renouvelable ne sera disponible avant 2 020 ou 2 023.

(L'avantage des centrales à Gaz à cycle combiné est qu'il ne faut que deux ans pour en construire une, et que le coût est évidemment considérablement inférieur à celui d'un réacteur nucléaire !

Quant à lancer la construction de centrales à fuel ou à charbon, personne n'oserait le suggérer…Quoique….).

Il semble donc tout à fait irréaliste de se battre sur une décision de réduction rapide de la puissance électronucléaire, c'est tout simplement impossible avant au mieux 2023.

Sauf bien sûr à lancer un vaste programme de construction de centrales à Gaz, ce qui hélas risque fort de nous pendre au nez…

Il y a en effet de fortes chances pour que la transition énergétique démarre par le lancement d'un important programme de construction de centrales à combustibles fossiles.

On vous avait bien dit qu'il faudrait choisir entre la peste ou le choléra.

Et pendant ce temps, les Shadoks pompaient….

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