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24 février 2024 6 24 /02 /février /2024 10:39

Voiture électrique, toujours des histoires d'autonomie.

24 Février 2024

La course à l'échalote vers des autonomies miraculeuses des voitures électriques contribue au contraire à ternir leur réputation. Les clients qui achètent un tel véhicule sur la foi des chiffres officiels d'autonomie WLTP mis en avant par les constructeurs de VE déchantent lorsqu'ils sont confrontés à la réalité du terrain.

Cela nuit à la réputation des VE qui sont, par ailleurs, d'excellentes voitures.

Ces petits « arrangements » publicitaires peuvent dégoûter l'automobiliste qui acquiert son premier VE et qui découvre l'angoisse de la panne sèche, contrariété qu'il n'imaginait pas devoir affronter régulièrement avec, en sus, un réseau de rechargement de batteries dont la fiabilité et la densité sont « perfectibles ».

Voici un exemple typique :

Tel modèle récent de « petite » voiture électrique équipée d'une batterie de 60 kWh annonce une autonomie WLTP de 470 km, suffisante pour décider un client à acquérir l'objet.

Mais dans le monde réel, hors des catalogues, règnent les lois de la physique et de la technologie, qui sont insensibles aux arguments de ventes les plus convaincants.

Les batteries au Lithium de la technologie actuelle sont très performantes à conditions de respecter certaines précautions d'utilisation sous peine de voir leur durée de vie compromise, ou leurs caractéristiques dégradées.

Par exemple ( entre autres ), ne jamais décharger la batterie en dessous de 5% de sa capacité nominale, ne jamais la surcharger au voisinage de sa tension maximale, ne jamais la charger si sa température est inférieure à 0°C, et toujours surveiller sa température de fonctionnement qui doit demeurer de préférence entre +10 et +50 °C, ses meilleures performances étant obtenues entre +20°C et 40°C, etc...

Ces conditions sont, en principe, respectées grâce d'une part au BMS de la voiture, et d'autre part au logiciel de la borne de chargement qui ne délivre la puissance demandée que si les conditions requises sont vérifiées.

D'autre part, dans le mode charge rapide, les bornes de charge limitent automatiquement le mode rapide à 80% de charge pour éviter une surchauffe de la batterie, en particulier si le système de refroidissement de la batterie n'est pas suffisamment dimensionné.

( Les batteries actuelles au Lithium à électrolyte liquide sont sujettes à l'emballement thermique si leur échauffement n'est pas promptement maîtrisé ).

Sur un trajet autoroutier, la partie utilisable de la batterie de 60 kWh sera donc de 45 kWh.

Par ailleurs, sur autoroute , à 120 km/h, la consommation d'une voiture électrique moyenne est autour de 20 kWh/100 km ( au mieux...).

Entre deux arrêts pour recharge, l'autonomie sera donc de 225 km.

C'est-à-dire moins de la moitié de l'autonomie annoncée dans le dépliant publicitaire.

Cet écart énorme, et systématique, dépasse l'entendement* et ce résultat devrait être clairement signalé à l'acheteur, ce qui n'est évidemment pas le cas, ou alors de manière très vague.

( Cet écart provient de la très grande différence de capacité énergétique spécifique entre l'essence et la batterie au Lithium :

14 kWh/ kg pour l'essence et seulement 0,2 kWh/ kg pour la batterie Lithium.

 Une batterie Li actuelle de 60 kWh pèse ainsi environ 300 kg, ce qui est un maximum de surpoids tolérable pour un véhicule de tourisme.

Malgré son meilleur rendement énergétique, le VE à batterie doit supporter ce handicap, en attendant l'aboutissement des recherches sur des technologies nouvelles...)

* ( cette faible autonomie sur autoroute est encore réduite si la climatisation est utilisée, et/ou en cas de vent contraire et/ou de profil montagneux de la route , et/ou de pleine charge du véhicule, et/ou d'ajout d'une remorque...).

L'autonomie annoncée par le dépliant correspond à des conditions d'utilisation définies par le protocole WLTP parfaitement officiel, mais qui correspondent à des usages qui n'ont rien à voir avec les conditions autoroutières.

Ceci devrait être clairement exposé à l'acheteur, ainsi que les problèmes qu'il rencontrera dans des conditions hivernales ou estivales, avec ou sans climatisation, avec ou sans remorque, ainsi que les conditions de recharge compatibles avec le modèle convoité ( Notamment le régime de charge rapide supporté par la batterie ).

A ce problème d'autonomie, inexistant pour les voitures thermiques, s'ajoute le problème de la charge rapide.

La charge d'une batterie peut s'effectuer à faible courant, typiquement C/0,1 qui correspond à une puissance de 6 kW pour une batterie de 60 kWh, dans le cas d'une charge sur un chargeur adéquat. La durée de la charge complète est alors de 8 à 10 heures.

C'est la configuration « charge à domicile », compatible avec les possibilités des contrats ENEDIS classiques, mais avec un chargeur dédié évidemment car le courant est quand même de 25 Ampères !

La charge peut également s'effectuer rapidement, voire très rapidement, sur une borne capable de délivrer un très fort courant, et donc une très forte puissance, à condition que la batterie soit spécifiée apte à supporter ce régime.

Pour un régime de charge à C 3 par exemple, notre batterie de 60 kWh sera rechargée à 80% en un quart d'heure sur une borne de 150 kW.

Mais le régime C 3 n'est pas accepté par toutes les batteries, les meilleures acceptent C2 dans cette gamme de produits.

( Car il y a aussi une échelle de performances pour les batteries. La capacité est une chose ; mais la fiabilité, les conditions de recharge, la résistance interne, la gamme de température, le cyclage, le système de refroidissement, etc, sont des paramètres qui font la différence entre une bonne batterie et une batterie lambda. Et le prix bien sûr...).

Il existe également des bornes de 350 kW, qui correspondent au futur marché de la charge rapide des batteries de 150kWh qui sont aujourd'hui dans le haut de gamme mais sont appelées à équiper le moyen de gamme dans quelques années. Ces bornes seront compatibles avec les deux standards ( 400 V et 800 V ).

Entre 6 kW et 350 kW il existe toute une famille de bornes de charge de puissances diverses. L'appellation «borne de charge rapide » est vague, elle désigne plus ou moins toute borne capable de délivrer plus de 50 kW en courant continu.

Dans notre exemple d'une batterie de 60 kWh, la partie utilisable en charge rapide est d'environ 45 kWh. Chaque recharge ( tout les 225 km sur autoroute ) sur une borne de 50kW durera donc une heure ( régime C1 ), soit trois heures « perdues » pour un parcours autoroutier de 700 km environ.

C'est évidemment inacceptable dans le cadre d'un usage fréquent.

Pour réduire ce temps de recharge à 20 minutes environ, il faut donc des bornes de 150 kW.

Mais encore faut-il que notre batterie soit capable de supporter le régime de charge C3 , ce qui n'est pas automatique ( en fait c'est plutôt rare, et cher ).

( sur les modèles de milieu de gamme, le régime de charge est au mieux limité à C2 , ce qui limite la puissance de charge à 100 kW pour notre batterie de 60 kWh) .

Par contre, en utilisation urbaine ou périurbaine, avec recharge au domicile sur un chargeur domestique, ce problème d'autonomie ne se pose pas, car les distances journalières et les vitesses pratiquées sont faibles et la récupération d'énergie au freinage est efficace. L'autonomie se rapproche alors de la valeur catalogue et tout va pour le mieux.

Mais pour des déplacements sur longues distances, il est nécessaire de programmer les recharges de la batterie et choisir l'itinéraire en conséquence, ce qui constitue une « charge mentale » supplémentaire que certaines personnes n'accepteront pas aisément.

La très grande dépendance de l'autonomie des VE aux conditions d'utilisation est donc un problème qui ne doit pas être glissé sous le tapis, tout au moins dans la perspective de l'interdiction de la vente de véhicules thermiques dès 2035.

Pour que ce vœux soit réalisable, il faudrait améliorer sérieusement quelques points :

- Doubler la capacité spécifique énergétique des batteries pour atteindre 100 kWh utiles pour un poids de 300 kg et 500 km d'autonomie sur autoroute.

- Garantir un régime de charge C3 pour une charge en 20 minutes sur des bornes de 300 kW.

- Réduire les coûts pour développer le marché hors subvention.

- Développer le réseau de stations de recharge dans une optique d'unification des procédés, d'augmentation des puissances vers 300 kW compatibles 400 et 800 V.

Faute de quoi on peut craindre que l'objectif de 2035 ne sera pas réalisable ( 100% des ventes de voitures neuves ).

Compte tenu du « retard » actuel dans la réalisation des quatre conditions ci-dessus, il est plus que vraisemblable que Bruxelles devra reconsidérer sa position et repousser le délai fixant à 2035 l'interdiction des ventes de voitures thermiques.

D'autant plus que cette ukase élimine de facto la possibilité d'une solution complémentaire utilisant les biocarburants et/ou les e-fuels, qui auront leur rôle à jouer dans la transition énergétique.

La décision de Bruxelles, qui consiste à brûler ses vaisseaux pour éviter tour retour en arrière , revient à jouer aux dés le sort de l'industrie automobile européenne.

Une manœuvre de tripot.

Les élections auront lieu en Juin.

Qui acceptera de jouer aux dés le sort de l'Europe ?

 

 

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