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4 mars 2024 1 04 /03 /mars /2024 19:00

 

La transition énergétique à la croisée des chemins.

4 Mars 2024

- La période des grands discours au sujet de la meilleure façon d'effectuer cette transition énergétique est terminée. Maintenant est venu le temps d'agir.

Et donc se se colleter avec les vrais problèmes, ceux qui ne peuvent pas se résoudre avec de beaux rapports illuminés de graphiques multicolores.

Quelques-uns de ces problèmes de terrain commencent à apparaître.

On aurait pu croire que la transition énergétique consistait « simplement » à remplacer quelques installations d'extraction de produits fossiles par d'autres installations de production, certes un peu plus sophistiquées, mais déjà identifiées et validées, donc sans surprise et sans problèmes de fond. Il n'y avait qu'à...

Que nenni.

- Pour l'essentiel, notre monde de machines fonctionne sur le principe de la combustion des fossiles. Même les besoins d'électricité sont satisfaits majoritairement par des machines à combustion ( Centrales électriques à fuel, Gaz naturel, beaucoup fonctionnant encore au charbon... ).

Or, les nouvelles sources d'énergie renouvelables produisent principalement de l'électricité, qui ne peut pas servir à alimenter des moteurs thermiques ( Turbines ou moteurs à combustion interne ).

Il y a donc deux voies possibles : soit remplacer les fossiles par de la biomasse, soit remplacer toutes les machines thermiques par des électriques.

Nous devrons probablement faire les deux.

La solution de la biomasse rencontre ses limites dans la déforestation induite, le conflit avec les cultures vivrières, et l'absence de gain sur les rendements énergétiques.

Quant à l'électrification des machines, elle suppose préalablement l'établissement de réseaux de distribution, ce qui limite son usage à des pays déjà développés.

( Et, sauf erreur, la transition énergétique sera mondiale, ou ne sera pas...).

La première inconnue est donc la future répartition entre électricité et biomasse ; cette incertitude n'est pas favorable à la planification des investissements qui nécessitent un minimum de visibilité à long terme.

D'autant plus qu'il y a encore beaucoup de questionnements sur les biocarburants de troisième génération, et quant à l'Hydrogène naturel, qui n'est encore qu'un fantasme, il est cependant suffisamment crédible pour susciter un certain attentisme chez les décideurs en créant un espoir qui sera peut-être déçu.

- La croissance de la production d'électricité éolienne et solaire a mis en évidence les inconvénients d'une production soumise aux caprices des éléments, qui peuvent générer une forte baisse de production de longue durée ( plusieurs semaines, voire plusieurs mois).

La nécessité de compenser ces périodes maigres par des installations de production de base pilotables n'est désormais plus contestée.

( L'illusion d'un foisonnement de la production a été démentie par l'expérience ).

L'hydroélectrique ou les batteries sont pilotables avec des temps de réponse très courts, mais leur capacité énergétique est trop faible pour intervenir sur des durées supérieures à quelques heures.

Aujourd'hui les moyens de secours long terme sont des centrales à Gaz naturel ou à fuel, voire même des centrales à charbon, qui devront demain être alimentées avec du Biogaz ou de la Biomasse solide ou liquide.

Mais, faire de l'éolien et du solaire pour échapper aux centrales thermiques, et se retrouver avec des centrales thermiques pour compenser l'intermittence de l 'éolien et du solaire, voilà qui n'est pas sans rappeler certains Shadoks de notre enfance...

Ce problème de fond n'est toujours pas résolu.

En France, l'Hydroélectrique de barrages a pu être considérée comme un excellent moyen de pallier les défaillances de l'éolien et du solaire, mais d'une part les quantités d'énergie disponibles seront vite épuisées ( Quelques jours...) et d'autre part cette eau sera précieuse pour aider l'agriculture dans les périodes de sécheresse qui sont annoncées ; elle ne pourra donc pas servir pour les deux fonctions...

A ce problème de fond vient s'ajouter le problème de l'emprise territoriale et maritime des parcs de production éolienne et solaire.

La montée en puissance de cette production intermittente pose en effet un problème d'acceptabilité difficilement surmontable, qui conduira à en limiter la part dans le mix énergétique.

Ces évaluations n'ont toujours pas été effectuées.

Les rôles respectifs des énergies renouvelables sont donc encore à définir, ce qui complique les prévisions d'investissements dans telle ou telle filière.

( Il va de soi qu'il n'est pas question d'investir massivement dans toutes les filières, il faudra donc faire des choix...).

Certains ont tenté de glisser ce problème d'intermittence sous le tapis en évoquant la possibilité d'inverser le système de distribution électrique actuel qui consiste à adapter la production à la demande.

Bons sang mais c'est bien sur, il suffirait d'adapter la demande à l'offre d'énergie !

Nous leur souhaitons bien du plaisir...

D'autres encore ont suggéré de reporter ce problème d'intermittence à la charge des utilisateurs grâce à la généralisation d'un système de production locale à base de panneaux solaires et de batteries domestiques, le tout couplé à la batterie d'un véhicule électrique ( genre « cybertruck » de Tesla ) , une sorte d'usine à gaz d'intérêt local mais dont on ne voit pas le début du commencement de la réalisation.

Les amoureux de la pile à combustible voient dans l'électrolyse la solution pour le stockage de longue durée, l'Hydrogène obtenu pouvant de plus être utilisé à toutes les sauces dans la filière Hydrogène, l'électricité étant reconstituée grâce aux piles à Hydrogène.

Aucune de ces « solutions » n'a encore pu être validée, en sorte que le problème de la compensation de l'intermittence des renouvelables demeure entier.

- Ce contexte peu rassurant conduit inévitablement à reconsidérer la production d'électricité nucléaire comme un moyen honorable de recours permettant au moins de passer cette phase d'incertitude concernant les capacités des renouvelables à prendre le relais des fossiles dans toutes les applications.

Mais il s'agit d'une technologie à ne pas mettre entre toutes les mains, et donc qui ne peut être disséminée comme l'éolien, le solaire, l'hydroélectrique, la géothermie, ou le thermique à biomasse, que l'on peut installer partout.

D'autre part, il y aura des choix à faire entre le « gros » nucléaire ( genre EPR ) et le « petit » nucléaire type « SMR » ou « Nuward », choix qui engageront l'avenir pour plusieurs décennies.

Donc, pour le nucléaire également, les prévisions d'investissements manquent encore de bases de décisions car certains problèmes de fond ne sont pas encore éclaircis.

Ainsi, le choix des systèmes de production d'énergie renouvelable est très loin d'être arrêté. Sachant qu'il faudra investir des milliers de Milliards, on comprend que les décideurs ne soient pas pressés.

Mais ce n'est pas tout.

- Le choix des sources d'énergie de substitution est une chose, l'utilisation de cette énergie en est une autre. Quelles que soient les futures sources d'énergie renouvelables utilisées, tout le monde s'accorde à reconnaître que les quantités disponibles seront très inférieures à celles que les fossiles nous dispensent jusqu'à présent, et pour encore quelques années.

Il nous faudra donc les utiliser avec parcimonie.

Ce programme d'économie est donc un autre volet de la transition, tout aussi important que le changement des sources d'énergie.

D'abord il faudra réduire drastiquement l'écart entre énergie primaire et énergie finale.

C'est le remplacement des moteurs thermiques par des moteurs électriques là où c'est possible, et à condition que l'électricité soit produite à partie de sources décarbonées ou à carbone recyclable.

C'est également utiliser la cogénération pour valoriser la chaleur perdue.

( Y compris peut-être pour les centrales nucléaires ? ).

C'est enfin puiser dans l'immense réservoir d'énergie géothermique de surface en généralisant les pompes à chaleur pour la production de chaleur basse température.

Dans le même temps il « faudra » développer un programme pour l'utilisation rationnelle de l'énergie.

Non seulement pour l'isolation thermique des bâtiments et leur conception, mais aussi pour l'optimisation des transports routiers, ferroviaires, maritimes, aériens, et pour l'ensemble des usages de l'énergie dans toutes les activités, y compris les loisirs et le sport.

Il s'agit donc, non seulement de puiser notre énergie à des sources différentes, mais également reconditionner toutes les utilisations de l'énergie pour les adapter à un régime de parcimonie afin de remplacer le régime actuel de gaspillage sans contrôle.

Sans parler de la nécessaire remise en question de certains modes de vie très énergivores, mais peut-être pas tout à fait indispensables au bien-être des peuples...

( La fameuse « règle » des quatre voyages touristiques en avion par an est une proposition provocatrice, mais c'est un peu l'idée...).

Le principal obstacle à une mobilisation planétaire est la disponibilité persistante des énergies fossiles, à un coût encore gérable. Cette situation n'incite pas vraiment à mobiliser des investissements colossaux pour renverser la table et prendre le risque de déstabiliser un équilibre industriel, économique, et social, qui amorcerait une phase de désordres permanents incontrôlables.

( On connaît hélas l'issue des crises économiques...)

Un exemple des conséquences possibles d'une décision en accord avec la volonté de réduire la consommation d'énergie fossile nous est donné par le remplacement des voitures thermiques par des voitures électriques.

Ce changement de technologie comporte naturellement quelques difficultés, comme toute innovation.

Les difficultés rencontrées portent non pas sur le véhicule lui-même, dont la conversion ne pose aucun problème vraiment nouveau, mais sur l'alimentation du véhicule en électricité.

A la fois la quantité d'énergie embarquée pour assurer une autonomie acceptable, et le réseau de recharge des batteries pour éviter de passer plus de temps à recharger qu'à rouler, posent problèmes pour lesquels les solutions tardent à arriver.

A ces deux problèmes vient s'en ajouter un troisième, peut-être le plus important, qui est la nécessité d'un réseau de distribution électrique d'une part, et capable de délivrer les puissances nécessaires à la recharge des batteries d'autre part.

Conditions qui ne sont satisfaites que dans les pays développés. Ailleurs, seules les agglomérations disposent des structures électriques suffisantes.

.Dans ces conditions il est clair que la voiture électrique ne pourra pas satisfaire la totalité du marché mondial, qui concerne un parc de plus de un Milliard de véhicules.

Les constructeurs devront donc s'adapter à ce double marché, les choix ne sont pas évidents car ils mettent enjeu l'avenir de l'industrie automobile.

Seuls ceux qui auront fait les bons choix survivront après 2050...

La transition énergétique ne sera donc pas un long fleuve tranquille.

D'autant plus que d'autres milliers de milliards devront être dépensés pour réparer les dégâts déjà inévitables causés par le changement climatique.

Il reste encore à évaluer le problème de fond qui est de savoir s'il y aura assez d'énergie pour donner aux onze Milliards de terriens, prévus par l'ONU au siècle prochain, un niveau de vie décent en rapport avec les standards des pays développés actuels.

Sinon, on fait quoi ?

Parler de « croisée des chemins » est un euphémisme. Il s'agit en fait d'un gigantesque chantier sans chef de chantier, où s'affrontent des intérêts contradictoires, où chacun tâche de préserver ses propres intérêts et son indépendance tout en renforçant ses positions sur les marchés internationaux.

Le tout dans une atmosphère délétère de changement des équilibres mondiaux, voire d'affrontements guerriers, où il devient plus important de fabriquer des obus que des batteries de voitures électriques...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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