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11 mai 2020 1 11 /05 /mai /2020 18:12

Une boîte de vitesse pour la voiture électrique ?

11 Mai 2020

Un des avantages (économiques) de la voiture électrique à batterie réside dans la possibilité de se passer d'une boîte de vitesse et d'un embrayage grâce à la disponibilité du couple moteur dès la mise sous tension, sans attendre une montée en régime.

C'est un avantage économique non négligeable, mais qui comporte une contrepartie liée à l'apparition de pertes importantes aux hauts régimes de rotation nécessaires pour un trafic autoroutier normal .

Aux pertes joule classiques dues à la résistance des bobinages en cuivre, s'ajoutent les pertes par hystérésis et courants de Foucault dans les noyaux métalliques du stator et du rotor pour les modèles à induction.

La plupart des VE sont équipés de moteurs à courant alternatif triphasé synchrones à aimants permanents (PMSM), plus rarement à induction (IMSM), voir Renault Zoe, Tesla S).

Comme sur tous les moteurs électriques, le stator comporte des bobinages sur un noyau en tôles d'acier au fer doux créant un champ tournant. Le rotor peut être de deux types :

Un rotor à aimants permanents*, donc dépourvu de bobinage, ou un rotor à induction bobiné et donc alimenté pour créer le champ magnétique d'interaction avec le stator.

*Ce sont eux qui contiennent les fameuses terres rares.

Contrairement aux moteurs industriels courants qui utilisent l'électricité du réseau à 50 HZ, et tournent à quelques milliers de tours/min, le moteur du VE est alimenté par un onduleur à fréquence variable qui permet de varier le régime entre zéro et un maximum qui dépasse largement 12 000 tours/min.

( Prochainement 20 000 tr/mn, et des recherches sont menées pour obtenir des régimes encore plus élevés).

Les matériaux utilisés dans les stators et les rotors à induction, n'aiment pas les hautes fréquences. Ils sont le siège de pertes par hystérésis et courants de Foucault, dont la valeur croît lorsque la fréquence augmente, comme on peut le voir sur le graphique ci-après qui représente un cas moyen de moteur triphasé synchrone.

Le graphique ci-après représente le diagramme de fonctionnement d'un moteur triphasé synchrone de traction, avec les courbes iso pertes.

 

Une boîte de vitesse pour la voiture électrique ?

Les courbes iso-pertes sont au pas de 500 W ; on constate leur resserrement dramatique dans les zones de couple élevé ou de régime moteur élevé.

L'augmentation importante de ces pertes se traduit par deux phénomènes :

Augmentation de l'énergie calorifique à évacuer par le système de refroidissement, qui nécessite un sur dimensionnement du moteur et du système de refroidissement.

Diminution du rendement du moteur, qui se traduit par une réduction, souvent importante, de l'autonomie du véhicule.

De plus, le refroidissement du cœur du moteur devient très difficile et nécessite même parfois une circulation interne du fluide ; tout ceci entraîne des coûts supplémentaires et des risques de surchauffe avec détérioration notamment des aimants permanents du rotor.

La courbe A en pointillés représente le couple de résistance à l'avancement.

A 90 km/h il est de 24 Nm. Pour maintenir cette vitesse sur route plate il suffit donc que le moteur développe un couple équivalent, ce qui correspond à une puissance de 22,7 kW.

( P = 0,105 . C . N avec P en W, C en Newon.mètre, et N en tours/minute )

A cette vitesse le graphique nous indique des pertes de 1,25 kW environ, ce qui correspond à un rendement de 94,8 %.

A la vitesse de 120 km/h, le couple résistif est de 42 Nm, et donc la puissance requise est de 52,9 kW.

Les pertes en ce point de fonctionnement sont alors de 7 kW, ce qui conduit à un rendement de 88,3 %, soit une chute de 6,5% .

A ces pertes il faut ajouter celles qui correspondent à la zone de couple élevé sollicitée lors des accélérations du véhicule.

Ces phénomènes constituent un frein à l'usage de ces moteurs aux très hauts régimes de rotation atteints sur autoroute, la réduction drastique de l'autonomie n'étant que la partie visible d'un ensemble de déboires qu'il serait possible d'éviter en utilisant une boîte de vitesse à plusieurs rapports, comme sur les moteurs thermiques.

Notons au passage que Tesla résout (?) le problème sur la S en utilisant deux moteurs, ce qui est une solution pour le moins onéreuse, interdite à monsieur tout le monde.

Un exemple de « vraie » boîte deux rapports sur un VE est la Porsche Taycan, mais qui n'est pas un véhicule de grande diffusion.

Pour un marché plus large, la société ZF a développé une boîte à deux rapports pour véhicules électriques de grande diffusion, susceptible de supporter jusqu'à 250 kW avec le couple associé.

L'option deux vitesses entraîne un coût supplémentaire, mais en contrepartie apporte des avantages non négligeables :

Possibilité de proposer des vitesses « autoroutières » tout en maintenant la consommation dans des limites raisonnables et sans nuire aux capacités d'accélération sur le premier rapport.

Accroissement de l'autonomie réelle avec un comportement autoroutier « normal ».

Pour le constructeur, une meilleure maîtrise des pertes moteur signifie une moindre surcharge thermique de tous ses éléments et donc plus de marge sur les composants et sur le système de refroidissement, et donc sur le coût, ce qui devrait compenser en partie le coût supplémentaire de la boîte.

De plus, un système à deux rapports permettra au logiciel de choisir le meilleur équilibre entre les deux zones de fonctionnement (Couple constant et puissance constante) afin d'obtenir le meilleur résultat lors de l'homologation.

Cette boîte à deux rapports sera bien sûr automatique, le choix du point de passage étant laissé au logiciel avec une possibilité de choix par le conducteur entre deux modes selon le profil de la route et le mode de conduite désiré.

Compte tenu de tous ces avantages, on peut penser que la boîte automatique à deux vitesses séduira le haut de gamme, Porsche a déjà montré le chemin. Le milieu de gamme devrait suivre avec quelques années de retard, si les promesses de ce nouveau système sont tenues.

 

 

 

 

 

 

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commentaires

Y
Je suis étonné par votre conclusion sur la boite a deux rapports. Porsche a mit une boite a deux rapports, mais surtout pour augmenter l’accélération au détriment de l'autonomie.<br /> La Zoe, pourtant plus légère qu'une Tesla modèle 3, consomme plus sur autoroute. La technologie des moteurs n'est pas plutôt la clef ?
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D
Bonjour yoyo,<br /> Sur autoroute donc à vitesse constante la plupart du temps, le poids intervient peu sur la consommation, par rapport au maître couple (Cx) .<br /> A 130 km/h, la ZOE est sur point de cracher ses poumons, alors que la Tesla est très à l'aise car sa motorisation est surdimensionnée pour ces vitesses, il est donc normal que la zoé consomme davantage, son moteur est dans la zone de fortes pertes de rendement.<br /> Je ne voit pas où est le problème.<br /> En utilisant deux rapports de transmission, Porsche (qui s'y connaît « un peu » en boîtes de vitesses) ne fait qu'appliquer une recette largement utilisée avec les thermiques.<br /> Mais, là où les thermiques ont aujourd'hui besoin de 6, 7, voire 8 rapports, les VE devraient pouvoir se contenter de trois rapports.<br /> Tout le monde y viendra nécessairement tôt ou tard, lorsque les volumes de ventes permettront d'amortir ce coût supplémentaire.<br /> Merci de m'avoir lu.