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16 décembre 2019 1 16 /12 /décembre /2019 19:08

 

16 Décembre 2019

L'ouverture du marché de l'électricité à la concurrence, décidée par Bruxelles et imposée aux états membres, a suscité bien des convoitises en France.

Le gâteau est alléchant : 500 TWh à se partager, 35 Millions de clients, plusieurs dizaines de Milliards d'euros par an, avec de belles perspectives de croissance, eu égard aux nouveaux besoins liés à la transition énergétique.

Ce nouveau marché concurrentiel fut organisé en 2010 par la Loi NOME (Nouvelle Organisation du Marché de l'Electricité) .

Auparavant l'énergie électrique était fabriquée essentiellement par EDF, et quelques ELD (Entreprises Locales de Distribution); le mix électrique étant constitué de 75% d'électronucléaire, 10% d'hydroélectrique, et 15% de thermique (Gaz naturel, Fuel, Charbon), pour une production d'environ 530 TWh en tenant compte des pertes dans le réseau de distribution.

Cette structure monopolistique, sous la tutelle de l'Etat, fut en son temps mise sur pied avec l'objectif de donner à la France son indépendance énergétique, au moins pour l'électricité, qui ne se stocke pas comme les autres formes d'énergie.

L'objectif a été atteint, la France est même devenue exportatrice d'électricité.

Les temps ont changé, Bruxelles décide aujourd'hui ce qui est bon pour la France, y compris dans les secteurs stratégiques dont fait partie le service public de l'électricité.

Exit donc la stratégie énergétique française, l'heure est au grand marché européen au sein duquel doit s'exercer une concurrence « pure et parfaite ».

Depuis 2010 donc la France est tenue d'accueillir des fournisseurs alternatifs (FA) qui se positionneront en concurrents de EDF.

Même si l'ouverture du marché français est alléchante, il n'est pas simple de se frotter à la grosse machine EDF qui contrôle non seulement la fabrication de l'électricité, mais aussi sa distribution et la gestion du réseau à travers ses filiales RTE et ENEDIS.

Pour permettre à une concurrence de s'établir, la décision fut prise d'obliger EDF à céder à ses futurs concurrents une part de son électricité nucléaire au prix coûtant, au motif que le parc nucléaire appartient à la collectivité, devenu une sorte de bien public, un peu comme les barrages hydroélectriques.

Non seulement on leur offre un marché sur un plateau, mais en plus on dépouille EDF qui devient de fait une proie affaiblie.

Après analyse des coûts de l'électricité nucléaire, et avis de la Cour des Comptes,

le tarif ARENH (prix de session aux FA) a été fixé à 42 euro/MWh.

Ce prix est demeuré constant depuis 2012.

(Ce qui, entre parenthèses, en dit long sur le soi-disant coût exorbitant de l'électricité nucléaire).

Pour éviter tout de même le pillage de la maison EDF, un plafond fut fixé à 100 TWh/an, à partager entre les prétendants, selon des critères bien définis.

Les candidats concurrents de EDF avaient donc trois possibilités pour se procurer la précieuse énergie :

Soit la fabriquer soi-même.

Soit l'acheter sur le marché libre européen ( Epex spot ou à terme).

Soit acheter une part du quota de 100 TWh mis à disposition par EDF à prix fixe de 42 euro/MWh.

Fabriquer de la bonne électricité ex-nihilo coûte cher, très cher, mais on peut l'acheter sur le marché libre européen, dont les cours fluctuent comme tout produit énergétique.

Les candidats fournisseurs alternatifs doivent respecter un cahier des charges bien sûr technique, mais aussi concernant le respect lié à l'obligation de service public, notamment les garanties de capacité, et l'origine de l'électricité injectée sur le réseau.

En fait les trois options sont sollicitées, selon les ambitions et les moyens des candidats, et bien sûr selon la part ARENH obtenue, le prix sur le marché libre servant de régulateur.

Chaque prétendant doit présenter son dossier en fin d'année courante pour l'année suivante ; il est retenu, ou pas, selon des critères sévères.

La demande d'électricité ARENH dépend évidemment du cours du MWh sur le marché européen.

Jusqu'en 2017 il était possible de trouver au marché de gros européen des MWh moins cher que le tarif ARENH. Le quota de 100 TWh était alors suffisant.

Mais en 2018 et 2019 les cours ont augmenté au-delà du tarif ARENH, demandes l'électricité ARENH ont augmenté fortement jusqu'à dépasser largement les 100 TWh alloués. On parle de 150 TWh.

Dans ce contexte, les concurrents de EDF demandent une augmentation du quota ARENH, et ils auraient bien tort de se priver puisqu'ils font d'une pierre deux coups :

D'une part ils se procurent de l'électricité  à bas coût, ce qui leur permet d'accroître leur part de marché, et d'autre part ils torpillent EDF en le dépouillant de sa production, ce qui constitue une première mondiale en matière de « modèle » économique, une innovation stupéfiante qui fera date dans les programmes des écoles de commerce.

Il est évident qu'un tel système ne peut perdurer sans mettre en péril l'opérateur historique.

Ce que l'Etat, à l'origine du dispositif ARENH, ne peut pas ignorer puisqu'il est lui-même « patron » de EDF en tant qu'actionnaire très majoritaire (plus de 83%).

L'Etat aurait la volonté de détruire la citadelle EDF qu'il ne s'y prendrait pas autrement.

Pour la remplacer par quoi ?

Le projet HERCULE nous éclaire sur cette stratégie du pélican :

En très gros il s'agirait de re-nationaliser l'électronucléaire, et de privatiser le reste.

Le reste étant constitué des énergies renouvelables et des centrales thermiques à gaz.

L'inconnu étant le sort réservé à l'hydroélectrique des grands barrages, qui pourrait subir le même destin que le nucléaire.

Ce jeu de chaises musicales (des chaises à plusieurs dizaines de Milliards), s'il est mis en œuvre, aura un impact majeur sur l'avenir du marché de l 'électricité en France.

Pour le consommateur, le risque est de voir le prix du kWh s'envoler, et ceci dès 2020.

Et le Linky n'y sera pour rien...

 

 

 

 

 

 

 

 

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