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26 novembre 2011 6 26 /11 /novembre /2011 10:49

26 Novembre 2011

Au-delà du tango médiatique sur le retrait ou non du nucléaire, débat récupéré par la campagne présidentielle, il nous a paru intéressant de regarder à nos pieds comment travaillent ceux qui sont chargés de nous fournir en électricité au jour le jour, en véritables soutiers de l’énergie.

Leur problème n’est pas de savoir quelle serait la meilleure énergie pour le prochain siècle, mais de prendre, hic et nunc, des dispositions à court terme pour être en mesure de garantir nos fournitures électriques demain matin, ce qui n’est pas tout à fait la même chose.

Leur mot d’ordre est donc « Faire du mieux possible avec ce qu’on a sous la main».

De quels éléments disposent-ils pour établir leur plan d’action ?

1- D’abord l’état des lieux de la production:

Production 2010 / Source RTE: 550 Twh

Dont Nucléaire: 407

Hydroélectrique 68

Thermique flamme 59

Eolien 9,5

Autres renouvelables 5,5

Consommation intérieure 2010 / Même source: 488 TWh

Gradient par rapport à la consommation 2009: + 1,9 %

Ces chiffres confirment ce qu’on savait déjà: production globalement excédentaire, à 74% d’origine nucléaire. Energie nouvelles encore balbutiantes ( 3,8% de la consommation ).

Ce que ces chiffres ne disent pas, c’est que, malgré une production globale excédentaire, la France doit importer de l’électricité pour répondre aux besoins en périodes de pointes, cela à cause du manque de flexibilité de la production nucléaire. En 2010 le solde des échanges frontaliers est positif, à environ 60 TWh, mais nos besoins en période de pointe sont assurés par nos voisins.

Ce bilan montre que la capacité de production instantanée est insuffisante pour couvrir les besoins de pointe. Il faut alors acheter du courant à nos voisins.

2- Ensuite, le contexte Européen et le marché:

Nos voisins, à qui nous achetons de l’électricité pour répondre aux besoins de pointe, ont engagé une stratégie de retrait du nucléaire.

Cette stratégie se traduira par une tension sur la disponibilité d’énergie électrique en Europe, avec possibles difficultés d’approvisionnement pour la France en périodes de pointe). De plus cette électricité importée sera produite par des centrales thermiques à flamme, ce qui n’est pas vraiment dans les impératifs du grenelle de l’environnement, bonjour le CO2!

3- Puis l’analyse des besoins prévisionnels:

Malgré les appels à la frugalité énergétique, on ne peut que constater une augmentation de la consommation ( + 1,9% en 2010 ) malgré la crise.

L’analyse des raisons de cette augmentation est un autre problème. Le fournisseur l’électricité se borne à constater les chiffres.

Le responsable des approvisionnements doit donc raisonnablement envisager une croissance de sa production pour pouvoir répondre à la demande.

Et ce n’est pas l’arrivée de la voiture électrique qui le fera changer d’avis !

4- Ensuite, la conjoncture politique et les retombées de Fukushima:

La pression des antinucléaires devient de plus en plus forte, la catastrophe de Fukushima a fait du nucléaire un enjeu de campagne électorale.

Il faut donc s’attendre, en cas de changement de majorité, à des décisions gouvernementales se traduisant par une baisse de la capacité de production nucléaire.

Le programme de l’opposition annonce clairement une réduction de 75% à 50% de la part nucléaire dans le mix électrique français, par un arrêt de vingt quatre réacteurs sur une période de quinze à vingt ans.

5- Enfin, les énergies nouvelles.

Aujourd’hui elles entrent pour 3,8% dans la consommation intérieure d’électricité en France.

Ce chiffre est évidemment très modeste, mais tout les indices laissent espérer une croissance lente, mais régulière. Un apport significatif n’est cependant pas attendu avant dix à quinze ans.

Ces énergies nouvelles présentent une caractéristique innovante: elles peuvent être produites par les particuliers ou les collectivités à proximité immédiate des besoins. Les installations peuvent ou non être raccordées au réseau.

Ceci veut dire qu’une partie importante des besoins nouveaux pourra être couverte de cette manière, soulageant d’autant la charge des grands opérateurs de réseaux.

A tout ces éléments viennent s’ajouter les aspects financiers

( investissements, coûts, rentabilité) , la politique d’exportation de la technologie française, l’ouverture des marchés mondiaux, les impératifs du Grenelle de l’environnement, la coopération internationale, la recherche, la formation, etc…

Le prix public de l’électricité en France est l’un des moins élevés d’Europe. Des changements radicaux de stratégie énergétique exigeront des investissements très importants, qui devront être en partie couverts par des augmentations de tarifs, que l’usager public n’est pas prêt à accepter.

 

Il en résulte une stratégie dont on peut essayer de deviner les grandes lignes:

1- Dans l’immédiat, pour éviter une pénurie de fournitures électriques en périodes de pointe, mettre sur pied un programme de construction de centrales thermiques à flamme capables de prendre la relève des fournisseurs étrangers aux abonnés absents. Ce programme est déjà en route.

2- A court/moyen terme, mettre en place un programme de rationalisation des consommations dans le but d’effacer les pointes ( projet Smart Grid).

Un tel programme peut être opérationnel dans un délai de cinq à dix ans. Il passe par la nécessité de remplacer les compteurs, et par la mise en place d’un service de communication interactif, ainsi que l‘adaptation des matériels.

3- Dans l’hypothèse d’une confirmation du programme d’arrêt progressif de vingt-quatre réacteurs, lancer un programme de construction de centrales thermiques à flamme capables de fournir annuellement les 100 TWh qui feront défaut. Il s’agit d’un programme sur vingt ans, devant accompagner la baisse de production nucléaire.

4- Soutenir un programme de développement des énergies nouvelles fondé sur des centrales solaires et des fermes éoliennes connectées au réseau.

5- Dans le même temps, prendre en charge l’arrêt et le démantèlement des réacteurs nucléaires mis à la retraite.

6- Dans le même temps, mettre sur pied le programme de sécurisation des réacteurs nucléaires conservés en exploitation.

7- Consentir un gros effort de recherche industrielle pour améliorer le fonctionnement des centrales thermiques à flamme et réduire leurs émissions de CO2.

Il va sans dire qu’un tel programme nécessitera des investissements colossaux qui ne pourront être trouvés que dans la poche des usagers consommateurs, à la fois par des augmentations de tarif et par l’émission d’emprunts.

La réalisation de ce programme ambitieux porterait alors la part des énergies fossiles carbonées dans le mix énergétique , de 12,3% aujourd’hui à plus de 25% en 2025, chiffre qui dépendra bien sûr des besoins énergétiques de l’époque, et du développement des énergies renouvelables.

Ce retour en force des énergies fossiles carbonées est la démonstration de la prééminence du principe de réalité, qui prime toujours sur les idéaux.

 

 

 

 

 

 

 

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commentaires

C
Le débat est rarement creusé.
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