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6 octobre 2013 7 06 /10 /octobre /2013 10:57

L’auto électrique, oui, mais on la branche où ?

6 Octobre 2013

Certains constructeurs tentent de promouvoir le concept de voiture tout électrique avec location de batterie. La simplicité du concept permet d’obtenir un coût de production compétitif, et la prime écologique peut séduire plus d’un acheteur potentiel.

Il n’est pas inutile de regarder d’un peu plus près de quoi il retourne, en particulier concernant le service rendu.

Ce type de véhicule doit être équipé d’une batterie de 20 à 25 kWh de capacité afin d’offrir une autonomie décente, environ 150 kms.

Dans la technologie actuelle, une telle batterie pèse 300 kg ( Batterie + système de gestion + berceau de fixation + renforts de suspensions et de caisse ).

Elle permet une autonomie équivalente à celle que procure une dizaine de litres de carburant classique dans un moteur thermique.

Un véhicule à moteur thermique est généralement équipé d’un réservoir de 50 à 70 litres, ce qui lui procure une autonomie cinq à sept fois supérieure à celle de son homologue électrique, et beaucoup plus avec du gazole.

Au crédit de la voiture électrique, on porte la possibilité de recharger la batterie sur une prise « domestique », ce qui permet de bénéficier d’un tarif de braderie.

Certes ce « plein » d’électricité ( 20 kWh) ne coûte que 2 euros à la maison, grâce auxquels on peut parcourir 150 km.

Pour parcourir la même distance, dans les mêmes conditions de conduite éco, une voiture « thermique » fonctionnant au gazole consommera 7 litres, coûtant environ 10 euros.

Sur une distance annuelle de 20 000 km l’économie réalisée avec l’électrique est de 1 100 euros environ.

La démonstration paraît concluante.

Si l’on oublie la location de la batterie.

En effet, pour diverses raisons, les batteries ( les grosses) sont généralement proposées en location à un tarif fonction du kilométrage annuel. Pour 20 000 km/an le loyer mensuel est d’environ 100 euros, soit 1200 euros par an ( Source Renault, modèle ZOE, contrat de 5 ans).

L’économie réalisée par rapport au thermique est annulée.

D’autre part la prochaine introduction de la tarification progressive de l’énergie prévoit d’établir des quotas de consommation domestique et de taxer les dépassements. Or un véhicule électrique qui parcourt 20 000 km/an doit recharger sa batterie environ 150 fois, ce qui constitue une consommation de 3 MWh ( Mégawatt-heure ) environ.

Lesquels seront soit taxés au titre du dépassement de quota de consommation domestique, soit soumis à la TICPE, soit les deux.

( 3 MWh électriques sont comptabilisés en énergie primaire pour environ 8 MWh, ce qui correspond à la consommation primaire de chauffage pour un logement de 160 m2 conforme à la règlementation RT 2012 !!!).

Il est probable qu’alors l’avantage financier de l’électrique ne sera plus qu’un souvenir lointain…

Mais ne nous égarons pas car le vrai problème est ailleurs.

La voiture électrique actuellement proposée doit donc être rechargée au bout de 150 km en moyenne.

A moins d’être confinée en ville en utilisation exclusivement citadine comme second véhicule, la voiture électrique devra être compatible avec les longues distances, plusieurs centaines de kms, comme c’est aujourd’hui devenu courant.

Cet usage exige que le réseau soit équipé de bornes de recharges rapides permettant de « faire le plein » en moins d’un quart d’heure. En effet il n’est pas question d’attendre 6 à 8 heures pour faire le plein.

Fournir 20 kWh en 15 minutes requiert une borne de recharge capable de délivrer une puissance de 80 000 W, ce qui est déjà respectable. Le courant délivré à la batterie de 400 V doit être alors de 200 A.

Chaque « station service » devra être équipée d’une dizaine de ces bornes, ce qui implique une installation de l’ordre du Mégawatt.

Nous laissons au lecteur le soin de recalculer ces chiffres pour les futures batteries qui sont censées permettre une autonomie de 500 kms. Le problème d’autonomie sera certes résolu, mais un nouveau problème apparaîtra, celui de la recharge de ces batteries monstrueuses.

Il y a aujourd’hui en France environ 12 000 stations services classiques, ce nombre s’étant à peu établi en fonction du parc de véhicules, de l’utilisation qui en est faite, de l’autonomie des voitures thermiques, et de l’intérêt des fournisseurs de carburants.

Le passage au tout électrique impliquera un nombre de points de recharge rapide supérieur à 12 000 puisque l’autonomie sera réduite.

Aujourd’hui, selon Chargemap, il y a en France 220 points de charge rapide, installés à 90% dans les villes de quelque importance, ce qui laisse un désert pour le reste du territoire.

L’acheteur d’un véhicule tout électrique doit savoir qu’il ne pourra pas s’éloigner de plus de 70 km d’une grande ville .

Au débuts du XXè siècle l’automobiliste prudent pouvait emporter un ou deux bidons d’essence pour éviter la panne sèche. L’électricité ne permet pas cette précaution.

Cette situation, parfaitement normale au demeurant pour un marché encore inexistant, représente le classique problème de la poule et de l’œuf.

Ce type de problème se traduit par un allongement de la période d’apprentissage, les industriels n’étant pas pressés d’investir dans une application qui n’existe pas encore, et qui peut-être n’existera jamais.

Ici le problème se complique à cause de l’absence de normalisation pour assurer l’interopérabilité entre les différents fabricants de voitures et les différents systèmes de bornes de recharge.

Il existe aujourd’hui au moins quatre systèmes de prises non compatibles, un standard européen est attendu mais pas avant 2015.

Aujourd’hui, non seulement le nombre de bornes de recharge rapide est ridiculement faible, mais si l’on en trouve une, il n’est pas certain qu’elle soit du type qui convient à votre auto !

Conscients de cette situation bloquée, la plupart des constructeurs se sont orientés vers l’hybride sous la forme d’un véhicule électrique avec un moteur thermique prolongateur d’autonomie, avec une batterie de capacité moyenne ( de l’ordre de 6 kW).

Un tel véhicule se passe d’un réseau de recharge et permet de lever le principal obstacle technologique au développement du marché.

Même Renault, jusque là partisan inconditionnel du tout électrique, semble avoir compris que l’issue est comme toujours dans le compromis.

Ce concept, s’il ne satisfait pas les puristes, permettra au moins au marché de démarrer dans des conditions plus réalistes et d’attendre une éventuelle solution de troisième génération ( 2030 ?).

La pile à combustible, attendue comme le messie, utilisera de l’Hydrogène et posera un autre type de problèmes. Par exemple celui du stockage embarqué de ce carburant dans des réservoirs sous une pression de plusieurs centaines de kg, et celui de la production de l’Hydrogène, l’électrolyse n’étant pas forcément la méthode la plus économique ni la plus efficace énergétiquement.

La voiture hybride à prolongateur d’autonomie sera peut-être LA solution pour les dix ou vingt ans à venir.

Nous en reparlerons.

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