Le nouveau compteur Linky, quelques idées reçues.
15 Septembre 2012
Comme toujours lorsqu’une application nouvelle est « imposée » sans explication, une polémique s’engage, ce qui révèle une saine vigilance du consommateur usager.
L’introduction du nouveau compteur électrique Linky n’échappe pas à la règle.
Parmi les arguments présentés ici et là, il circule quelques idées reçues qu’il n’est pas inutile d’essayer de démonter, ne serait-ce que pour préserver le sérieux des vrais arguments.
«Ce nouveau compteur communique grâce à des ondes nocives, comme celles du téléphone portable mis en accusation par l’OMS » .
Cette accusation résulte d’une confusion. Les transmissions CPL (Courants Porteurs en ligne) consistent en la superposition d’un signal de communication sur la tension du secteur 230 Volt.
Au début de cette technologie on n’utilisait que des signaux de communication à basse fréquence, les signaux à transmettre étant simples comme allumer les réverbères par exemple.
Puis la technologie et la règlementation ont évolué, jusqu’à permettre aujourd’hui la transmission de signaux à haute fréquence de plusieurs Mhz.
Ces signaux de haute fréquence sont effectivement perturbateurs car le réseau domestique 230 V n’est pas blindé et donc les fils du secteur servent d’antenne et rayonnent de manière sauvage.
Mais les transmissions CPL utilisées par EDF n’utilisent que le domaine basse fréquence qui lui n’émet aucune onde électromagnétique:
Deux fréquences: 63,3 KHz et 74 KHz
( Il s’agit de Kilo Hertz et non de Méga Hertz )
Modulation S-FSK.
Débit 2 400 bauds.
Il existe dans le résidentiel des applications communicantes qui utilisent des liaisons radio à haute fréquence, mais qui n’on rien à voir avec le compteur Linky. On les trouvent par exemple dans la Domotique, les systèmes d’alarme sans fil, les télécommandes, etc, etc…
EDF n’a rien à voir dans tout çà.
«Les ondes émises provoquent des troubles chez les personnes électro sensibles ».
Même réponse que ci-dessus.
Des manifestations d’électro sensibilité, qui n’ont rien à voir avec Linky, ont été rapportées et seraient dues à la proximité de lignes à haute tension ou d’un transformateur de distribution.
D’autres cas d’électro sensibilité seraient liés aux micro ondes émises par le réseau de téléphonie mobile. EDF et Linky y sont bien entendu étrangers.
« Ce compteur n’apporte aucune économie d’énergie»
Par lui-même ce nouveau compteur n’apporte techniquement aucun gain d’énergie dans une installation existante. Il n’est pas en lui-même un système d’économie d’énergie.
Par contre il offre de nombreuses possibilités qui, elles, conduiront à des économies lorsque le client voudra bien s’équiper pour en tirer profit. C’est un équipement pour l’avenir, prévu pour accompagner la transition énergétique.
Dans l’immédiat, sur une installation basique, le client ne verra aucune différence après remplacement de son compteur bleu électronique (CBE) par un Linky.
Par contre si son ancien compteur était un vieux truc électromécanique (encore 60 % du parc), il bénéficiera des possibilités de l’actuel CBE. Possibilités limitées mais non négligeables et susceptibles de permettre d’optimiser sa consommation dès maintenant.
« C’est une dépense inutile qui n’apportera rien en échange »
C’est faux, EDF ne facture pas le remplacement du compteur au client.
Bien évidemment l’opération a un coût qui sera intégré dans les dépenses d’investissement de EDF. Ce coût est annoncé à 4 Milliards d’euros pour équiper 35 millions de clients sur une période d’une dizaine d’années.
Cette dépense est à mettre en face des économies que ce système permettra à EDF de réaliser dans le futur, et qui se chiffrent en nombre de centrales économisées par une meilleure gestion de la consommation globale rendue possible grâce à Linky.
« Mes données personnelles vont circuler sur le réseau et pourront être piratées ».
Les échanges entre le compteur et le concentrateur sont cryptées par un système conforme au Green Book COSEM, avec une clé de 128 Bits.
La protection des données transitant par le réseau ERDF est donc assurée par des protocoles de haut niveau.
Par contre l’usage qui sera fait de ces données par le destinataire ( EDF ou tout autre fournisseur d’énergie comme Poweo, Direct Energie, GDF-Suez, etc…) devra être transparent et parfaitement encadré.
La CNIL doit être garante du respect de la vie privée, de la confidentialité, et de la protection des droits et intérêts du consommateur.
C’est un point qui aujourd’hui n’est pas encore très clair.
«Mes données pourront être utilisées par mon fournisseur d’électricité à des fins de marketing pour m’inciter à souscrire à des options coûteuses ».
Peut-être, mais le client n’est pas obligé d’accepter n’importe quelle proposition.
Les consommateurs reçoivent déjà aujourd’hui des propositions de la part de fournisseurs alternatifs et Linky n’y est pour rien.
Là encore la CNIL et les associations de consommateurs devront être attentives et exiger une grande clarté des diverses propositions tarifaires.
« Je ne serais plus maître chez moi si le fournisseur m’impose des délestages ».
Les délestages ne sont jamais pratiqués de manière impromptue. Ils sont négociés avec le client sur des bases contractuelles et avec des incitations tarifaires.
Lorsque, au cours d’une période de pointe de consommation, le gestionnaire de réseau constate un risque de saturation, il procède à des délestages pour éviter une panne générale par disjonction automatique.
Les zones touchées par le délestage sont évidemment intégrées dans un plan tenant compte des besoins des clients de la zone, et ceux-ci sont bien sûr informés.
Le compteur Linky permettra d’optimiser cette fonction client par client, et de lisser la consommation pour éviter le risque de saturation. L’objectif étant d’éviter tout délestage intempestif.
Aujourd’hui la puissance moyenne consommée par la France est de
45 GW, alors que les pointes de consommation atteignent 100 GW.
Le gestionnaire de réseau doit dont installer des capacités de puissance pour 100 GW, alors que la moitié devrait suffire. Il y a là un surcoût colossal qui sera atténué grâce à la transition vers un réseau intelligent, dont la première brique est le compteur Linky.
De plus il faut savoir que, au-delà de 80 GW consommés, la France doit importer de l’électricité. Or cette électricité est chère et d’autre part nos voisins s’orientent vers une sortie du nucléaire et donc ne pourront plus nous dépanner.
Il y a donc de multiples raisons qui rendent incontournable l’évolution vers un réseau intelligent.
En gros il s’agit de faire en sorte d’éviter que tous les clients démarrent leurs appareils de puissance en même temps. Pour cela il faut utiliser une programmation différée en concertation avec les clients d’une zone desservie.
Aujourd’hui, en cas de délestage, le client est totalement privé de courant, c’est le délestage sauvage.
L’objectif est de pratiquer un délestage partiel du client, en ne coupant que un ou deux appareils gros consommateurs, avec l’accord préalable de l’usager.
Ces applications ne peuvent être réalisées qu’avec un compteur communicant comme Linky.
« Big Brother va rentrer chez moi, on va tout savoir de mon mode d’existence »
La plupart des matériels électriques, sinon tous, sont alimentés par le secteur. S’il advient un jour que tous ces appareils sont équipés d’une interface communicante CPL, la confidentialité de l’usage de ces appareils dépendra du type de données qui circulera sur ces interfaces et à qui elles sont envoyées.
Ce sera à l’usager de veiller à ce que ses appareils ne soient pas trop « bavards ».
Le fournisseur d’énergie électrique n’a aucun besoin ( ni aucune envie) de savoir quand l’usager prend sa douche ou quand il regarde la télé.
Les informations transmises au fournisseur, et les possibilités d’intervention qui lui seront concédées sont à la discrétion du client.
A terme, lorsque la gestion intelligente de l’énergie sera une réalité, l’installation domestique sera équipée d’une interface client communicante globale ( Domotique) qui, seule, dialoguera avec le fournisseur.
C’est cette interface client qui d’une part recevra les données du fournisseur ( Offres tarifaires selon l’heure ou le jour, informations heures de pointe, alarme dépassement de puissance, demandes de délestage, données de comptage, etc…), et d’autre part gèrera l’installation du client en fonction des données Linky reçues.
Il n’a jamais été question d’envoyer à EDF des données signalant qu’un téléviseur était allumé ! Encore moins quel programme était regardé !
Seule l’interface Domotique du client saura quel appareil est en fonction et quand, et qui gèrera la programmation différée des appareils de puissance.
« Grâce à la possibilité de modulation tarifaire en temps réel je ne saurai jamais combien va me coûter le KWh que je suis en train d’utiliser »
On peut effectivement se poser la question.
Aujourd’hui le client connaît une fois pour toute le coût du KWh . Selon l’abonnement souscrit, il y a un tarif HP et un tarif HC, et les tranches horaires relevant de HP ou de HC sont fixes, ceci pour la très grande majorité des usagers. Le compteur est même équipé d’un interrupteur qui permet de mettre automatiquement en service les appareils de puissance que le client souhaite allumer seulement en HC.
Avec le compteur intelligent le fournisseur aura la possibilité de proposer en temps réel des aménagements tarifaires pour inciter le client à se reporter sur une tranche horaire plutôt que sur une autre. Bien sûr l’usager sera informé du détail de ces offres, mais encore faut-il que la signalétique soit bien visible et claire.
Le déploiement du nouveau compteur Linky est la clé qui permettra de réaliser le réseau intelligent sans lequel il sera tout simplement impossible de gérer la complexité de la distribution électrique bidirectionnelle du futur intégrant les énergies nouvelles.
PS. L’auteur déclare sur l’honneur n’avoir aucun lien d’intérêt avec EDF ou toute autre entreprise du secteur de l’Energie électrique.