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5 décembre 2012 3 05 /12 /décembre /2012 15:35

 

5 Décembre 2012

La tragédie de Florange se déroule sous nos yeux, les épisodes sont dans tous les médias. Au-delà du drame humain, qui peut concerner chacun de nous demain, se profile en raccourci le schéma de ce qui pourrait être dans l’avenir le modèle de l’affrontement du pouvoir politique et des acteurs économiques dans une économie libérale.

ARCELORMITTAL est un groupe international ayant son siège au Luxembourg, employant 260 000 personnes dans 60 pays.

Le Groupe produit plus de 100 millions de tonnes d’acier par an, représentant 10 % de la production mondiale.

Le site de Florange, qui emploie environ 630 salariés, est une infime partie de ce gigantesque consortium. Sa capacité de production est d’environ 2,5 millions de tonnes par an, dans deux hauts fourneaux.

Pour des raisons que nous ne commenterons pas ici le Groupe a décidé l’arrêt de ces hauts fourneaux, menaçant de fait les emplois du site.

Au cours des négociations entre le Gouvernement et la Direction du Groupe pour le sauvetage de Florange, un certain projet ULCOS a été cité comme solution possible permettant de pérenniser une activité sur place.

Le projet ULCOS, comme son nom l’indique, est un projet. Il s’inscrit dans la longue liste des travaux qui, de par le monde, s’efforcent de démontrer la faisabilité du concept de capture et séquestration du Carbone ( CSC), et plus généralement de réduire les émissions de gaz à effet de serre ( GES).

Le concept de CSC est déjà ancien, il est abondamment évoqué dans les différents rapports du GIEC, comme une méthode permettant de continuer à utiliser les combustibles fossiles tout en atténuant fortement les émissions de GES.

Dans ce domaine, passer de la théorie à la pratique n’est pas chose aisée. de nombreux problèmes sont à résoudre avant de pouvoir affirmer la faisabilité.

Ces problèmes sont spécifiques des trois étapes du procédé:

- D’abord la capture du CO2.

Plusieurs procédés de captage sont envisageables:

Postcombustion.

Oxycombustion.

Précombustion.

Qu’il est nécessaire d’expérimenter afin d’en évaluer la pertinence pour les différentes applications ( Sidérurgie, Pétrochimie, Cimenterie, centrales thermiques), les difficultés de réalisation, l’impact sur les coûts, et l’efficacité.

- Ensuite le conditionnement et le transport du CO2.

Transport sous quelles formes ( Gazeux sous pression à température moyenne, liquide à basse température), quels moyens d’acheminement vers les sites de stockage, quels réseaux, etc…

- Enfin le stockage lui-même.

Probablement l’aspect qui génère le plus de problèmes.

Caractérisation des sites de stockage, méthodes d’enfouissement, repérage des sites, surveillance des sites, acceptabilité par les populations, etc…

Aucun de ces trois types de problèmes n’a encore reçu de solution satisfaisante et définitive.

Les différents projets en cours ont pour but l’avancement des connaissances dans l’un ou l’autre domaine.

Selon Schlumberger, il existait en 2011 pas moins de 234 projets CSC de par le monde. ULCOS est l’un d’eux.

ULCOS ( Ultra Low CO2 emission Stelmaking) est un projet soutenu par la Communauté Européenne, auquel participent 15 pays européens et 48 entreprises ou organisations, dont ARCELORMITTAL, mais aussi THYSSEN KRUPP.

La phase 2011-2015 prévoit la réalisation de prototypes d’implantation d’une installation de CSC.

Florange a été cité comme possible support de cette réalisation pilote, portant sur l’un des deux hauts fourneaux pour la capture du CO2, et les salines de Lorraine pour le stockage.

L’affaire coûterait environ 600 Millions d’euros, avec la répartition suivante ( en cas d’élection du site évidemment):

-Etat français et collectivités territoriales: 180 M

- Commission Européenne: 250 M

- ARCELORMITTAL: 170 M

Ce qui permettrait de maintenir des emplois, mais pas forcément ceux qui existent déjà sur place.

D’autre part, il s’agit d’un projet et non d’une réalisation industrielle, or aujourd’hui Florange n’a pas cette vocation, ni le personnel nécessaire.

Le planning du projet ( échéance 2015) n’est pas compatible avec le maintien d’emplois de production à court terme.

D’autres problèmes doivent être considérés:

Le stockage par enfouissement dans un site Lorrain soulève de nombreuses critiques:

- Risques à long terme de voir le CO2 s’échapper par des fissures et de repartir dans l’atmosphère .

- Risque de perte de contrôle de la diffusion du CO2 dans le sous-sol, et de fragilisation des terrains.

- Connaissances insuffisantes des capacités réelles de stockage.

- Risques de fuites majeures avec problèmes de santé publique.

Etc…

Par ailleurs on peut se demander quel est l’intérêt d’une telle installation dans un site dont la fermeture était déjà programmée depuis plusieurs années, alors que les sites productifs récents sont en bord de mer ( Fos-sur-Mer et Dunkerque).

Le projet UCLOS est en attente d’élection par la CE. Il est en concurrence avec trois autres projets:

BELCHATOV, en Pologne, pour équiper une centrale au lignite .

GREEN HYDROGEN, aux Pays-bas, capture et liquéfaction du CO2 résultant de la fabrication d’Hydrogène.

PORTO TOLLE, en Italie, équipement d’une centrale électrique.

Le choix de la CE est attendu pour le 20 Décembre 2012.

Ces projets ( et les 231 autres de par le monde) , s’inscrivent dans une stratégie globale de réduction des émissions de GES.

Le moteur de cette stratégie est alimenté en grande partie par les perspectives financières ouvertes par le marché des quotas d’émission.

La deuxième phase du protocole de KYOTO, qui se termine en Décembre 2012, a vu la mise en place des quotas d’émission, avec plus ou moins de succès.

La dix-huitième réunion, qui se déroule actuellement au QATAR ( à Doha) est censée discuter entre autres de la suite à donner à cette histoire de quotas.

De ses décisions vont dépendre l’empressement avec lequel les industriels vont investir dans les programmes CSC.

Après tout, peut-être l’arlésienne de Florange reviendra-t-elle sur le devant de la scène…

 

 

 

 

 

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