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19 octobre 2016 3 19 /10 /octobre /2016 16:57

La voiture électrique, puissance et énergie.

19 Octobre 2016

Nous vivons une veillée d’armes, le moteur thermique jette ses derniers feux. Les braises ne sont pas encore éteintes, mais le clinquant des gadgets électroniques ne peut pas dissimuler les derniers soubresauts d’une technologie plus que centenaire.
Si les normes Euro étaient autre chose qu’un chiffon de papier, la plupart des modèles thermiques même récents seraient recalés, et les anciens auraient déjà disparu.
Leurs motorisations ne sont plus conformes aux nouveaux canons de la transition énergétique, il faut les éliminer du paysage.
Du moins si l’on accorde un minimum de crédibilité à la menace climatique et à la protection de l’environnement…
(Cette condition est loin d'être fantaisiste, au regard des "résultats" décevants de la COP 21).
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Ce n’est pas le concept de la voiture particulière qui est remis en question. Les progrès successifs en ont fait un produit sûr, confortable, associant la sécurité active et passive, indissociable de notre société qui n’acceptera jamais de remettre en question la mobilité connectée, devenue indispensable au mode de vie actuel, quoiqu’en disent les docteurs tant pis, qui veulent supprimer la bagnole et mettre tout le monde à bicyclette ou à pieds.
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La motorisation classique à moteur thermique cumule plusieurs tares, liées à l’utilisation des carburants pétroliers, mais aussi au principe même du moteur thermique:
- Les carburants pétroliers sont voués à la pénurie par épuisement des réserves, et de plus leur origine étrangère entretient une grande dépendance énergétique.
- Leur combustion dégagent du CO2 fossile, qui est l’ennemi planétaire contre lequel sont focalisées toutes les stratégies de transition énergétique.
- Le cycle thermodynamique mis en œuvre affiche une très mauvaise efficacité énergétique, avec des rendements mécaniques qui ne dépassent pas 25% en moyenne en usage normal.
- Au cours du cycle de fonctionnement, des températures très élevées sont atteintes, qui sont à l’origine de la formation de divers polluants comme les oxydes divers, des hydrocarbures imbrûlés, des métaux lourds, des suies et des micro et nano particules cancérigènes.
- Les Biocarburants de deuxième et troisième générations, qui paraissaient pouvoir redresser la situation, apportent certes une solution pour le CO2, mais leur utilisation dans un moteur thermique génère les mêmes polluants que les carburants fossiles, et le rendement énergétique est aussi mauvais.

Tant de nuisances réunies motivent la mise au rencart de ce vieux truc, dès lors que l’on prétend parler d’écologie.
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Il paraît donc logique d’écarter ce type de moteur pour le futur, leurs émissions polluantes n’ayant jamais pu être éliminées malgré les artifices mis en œuvre par les constructeurs.
(« Artifice » est un euphémisme, « tromperie sur la marchandise » conviendrait mieux…).
Seul le moteur électrique peut donc répondre au cahier des charges, grâce à son absence totale d’émission.
De plus, son excellent rendement mécanique, voisin de 85%, conforte définitivement son avantage.
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Les modèles hybrides, plébiscités aujourd’hui par les usagers, ne constituent qu’une solution intermédiaire, qui n’est acceptable que durant la période transitoire qui doit nous mener vers le transport réellement propre purement électrique.
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Dans la perspective d'une transition effectivement basée sur le respect de l'environnement, nous sommes fondés à envisager une électrification quasiment complète du parc automobile à l’horizon 2050.
Ce parc compte aujourd’hui 35 millions de véhicules particuliers, dont le kilométrage annuel moyen est de 12 000 Km.
Une voiture électrique (VE) moyenne consomme environ 20 KWh/100 Km.
Si l’on s’en tient au parc actuel, et dans l’hypothèse d’une électrification à 100%, la consommation annuelle directe d’énergie serait de 84 TWh, soit environ 100 TWh en tenant compte des pertes de rendement des infrastructures de transport et de distribution.
Ce qui représente la production de huit réacteurs nucléaires du type EPR, ou 8 000 éoliennes offshore de 5 MW.
Ces moyens considérables doivent être mis en balance avec les 30 Milliards de litres de carburants fossiles qui sont consommés aujourd’hui par nos automobiles.
Avec une "petite" différence:
Cette électricité, il faudra la fabriquer nous-mêmes, alors que pour le pétrole il « suffit » de signer un chèque.
La nuance est importante.
En effet, si les puits de pétrole du Moyen Orient et du Nebraska n'ont jamais empêché un défenseur de l'environnement français de dormir, il n'en ira pas de même avec les éoliennes offshore qui sont appelées à "décorer" nos côtes maritimes.
Or ces modernes moulins à vent devront être d'autant plus nombreux qu'ils leur faudra (peut-être) remplacer les réacteurs nucléaires.
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La construction des installations de production de cette énergie électrique devra être planifiée en temps utile et viendra s’ajouter aux besoins actuels réactualisés.
Ce surcroît de consommation électrique ( 20 % de la consommation actuelle) n’apparaît dans aucune étude sur l’évolution de la consommation énergétique.
Bizarre ? Vous avez dit bizarre…
En fait, les stratèges de la transition énergétique pensent que les économies réalisées sur le chauffage électrique grâce à la rénovation thermique, compenseront la demande nouvelle des voitures électriques.
Ce qui n’est pas faux, puisque le chauffage électrique représente une part très importante de la consommation d’électricité de 290 TWh du secteur résidentiel-tertiaire.
Une réduction de 30% de cette consommation suffirait à dégager l’énergie nécessaire pour alimenter 35 millions de voitures électriques.
Nous devront donc d'abord investir lourdement dans la rénovation thermique, pour pouvoir rouler en voiture électrique plus tard.
(Ou bien construire beaucoup de petits EPR, mais ceci est une autre histoire…).
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Mais l’énergie n’est pas tout.
On oublie souvent la puissance.
L’énergie est le produit de la puissance par le temps.
L’usager n’aimera pas perdre du temps à recharger sa batterie.
La notion de "charge rapide" a vite investi le vocabulaire du VE.
Pas question d'envisager des déplacements longs en VE sans une batterie de capacité confortable et supportant la charge rapide, et un réseau de bornes de charge capables de fournir les KW indispensables.
Et l'on arrive très vite à des valeurs de tension et de courant à la limite de faire péter les calculettes.
Par exemple pour charger en cinq minutes à 80% une batterie de 100 KWh (Tesla) , il faut une puissance d'un MW (1 000 KW) !!!
Il existe un tel projet, dans le mode DC 800 V /1 200 A.
Nous laissons au lecteur le soin d'apprécier les risques encourus lors de la manipulation à mains nues des câbles, prises et bornes de raccordement sous 800V les jours de pluie…
Au sujet de la sécurité des VE, nous conseillons la lecture du rapport que l'on trouvera ici:
http://formation.sdis42.fr/spiral-files/download?mode=inline&data=21909
C'est une lecture dont on ne sort pas tout à fait indemne.
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Les initiateurs des réseaux de bornes de recharge ont préféré rester dans les limites que la technologie actuelle sait gérer en garantissant un niveau de sécurité convenable pour l'usager.
Ils ont donc défini des bornes de charge "raisonnablement" dimensionnées, demeurant dans le domaine de la distribution EDF/ BT, c'est-à-dire 230 V AC  et 400 V DC compatible avec le réseau triphasé BT.
Les courants sont ceux que tout le monde sait manœuvrer sans technologie spéciale autre que celle qui est déjà expérimentée, soit une centaine d'ampères, Correspondant aux abonnements 18 KVA et 36 KVA triphasé.
Ce qui nous donne des puissances max de 40 à 50 KW pour une borne de charge, selon que le mode soit courant alternatif ou continu.
C'est la puissance des bornes du réseau Corri-Door en cours de déploiement.
Une telle borne permet de recharger à 80% en trente minutes une batterie de 30 KWh nominal.
C'est la charge dite "rapide".
Du moins telle qu'on la concevait à l'époque du lancement de ce projet.
La batterie reçoit une vingtaine de KWh, lui permettant de parcourir 100 à 120 Km jusqu'à la prochaine borne.
Evidemment, pour un trajet de 600 Km, il faudra s'arrêter cinq fois pour refaire le plein, ce qui est un gros handicap par rapport à un véhicule thermique, qui peut parcourir 800 KM voire plus, avec un plein.
Les constructeurs, conscients de la nécessité d'augmenter significativement l'autonomie de leurs VE, se sont lancés dans une course à la capacité des batteries.
De 20 KWh, on est vite passés à 30 KWh, et les 60 KWh sont annoncés pour 2017/2018, avec en ligne de mire les 100 KWh.
Mais l'autonomie procurée par ces grosses batteries ne sera effective sur de longs parcours que si la puissances des bornes de charge est à la hauteur.
(L'énergie et la puissance sont comme Dupont et Dupond, ils ne sont rien l'un sans l'autre).

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La charge rapide à 80%, en trente minutes, d'une batterie de 60 KWh, nécessite une borne de 100 KW, et quasiment le double pour une batterie de 100 KWh.
Le réseau devra donc être capable de fournir cette puissance aux différentes bornes de charge rapide qui seront disséminées sur le territoire.
Faute de quoi il faudra oublier la charge rapide, et accepter d'y passer une, deux ou trois heures à condition que le gestionnaire des bornes de charge tolère cette monopolisation des bornes, surtout en période d’affluence.
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La puissance que peut délivrer le réseau de distribution électrique n'est pas infinie.
En régime permanent, elle peut atteindre environ 80 GW en grattant les fonds de tiroirs:
63 GW d'électronucléaire, si les réacteurs sont de bonne humeur.
17 GW de thermique à Gaz et à fuel.
( L'hydraulique ne participe qu'à titre d'appoint pour une durée limitée, et l'éolien et le solaire idem pour des raisons évidentes).
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La puissance supplémentaire demandée pour la charge des batteries de VE dépendra évidemment du nombre de véhicules raccordés à un moment donné.
Ce nombre dépendra de l'importance du parc ( 10, 20, 30 millions ?) et d’autre part de la fréquence des demandes de recharge, qui varie selon l’heure, le jour de la semaine, l’occurrence de périodes particulières comme les week-end, ou les départs en vacances.
Par exemple, si un million de VE tentent de se charger simultanément sur des bornes de 50 KW, la puissance demandée sera de 50 Gigawatt, qui est presque la puissance totale du parc nucléaire !
Il y a donc un réel problème, qui apparaîtra à partir d’un taux de pénétration significatif du véhicule électrique ( 10% du parc ?).

D’autant plus que les bornes de charge rapide actuelle de 50 KW sont déjà dépassées. Le standard va très vite s’établir à 150 KW, puissance nécessaire pour charger en trente minutes à 80% les futures batteries de plus de 60 KWh annoncées pour 2018 par les constructeurs.
(Nos voisins européens sont déjà à 150 KW, le mouvement a été initié par Tesla).
Le problème de surcharge du réseau sera alors trois fois plus critique.
Il est donc impératif de prendre des mesures pour éviter un tel « embouteillage » qui serait source de black-out.
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Le réseau de charge rapide devra donc être géré pour éviter toute surcharge inacceptable.
Ceci implique deux démarches:
- La première consiste à adosser les bornes de charge rapide à des installations de stockage d’électricité, d’une capacité en rapport avec l’activité de la station, dans le but d’amortir le pic de puissance soutirée au réseau.
Ce stockage pourra être partiellement alimenté par une production locale solaire ou éolienne.
- La deuxième démarche implique un contrôle de l’activité des bornes, pour procéder, lorsque nécessaire, à un délestage provisoire ou à une limitation de la puissance autorisée.
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Il n’est pas impossible que ce problème de saturation du réseau devienne à terme un obstacle au déploiement du véhicule électrique à batterie, non pas pour une question d’énergie, mais à cause de la puissance maximale demandée au réseau à certaines périodes.
Déjà aujourd’hui EDF est confronté au problème des pics de puissance demandée au réseau, notamment en périodes hivernales à cause des chauffages électriques, et bientôt en été à cause des climatiseurs. L’installation des nouveaux compteurs communicants a pour but, entre autres, de permettre le gestion de ces pics .
 Ce problème risque de devenir insoluble si l’on y ajoute la demande de recharge des batteries de VE, lorsque ceux-ci existeront à plusieurs millions d’exemplaires.
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Et c’est là que les supporters de la voiture électrique sortent leur joker: la pile à Hydrogène.
Cet objet étrange est connu depuis presqu’un siècle, il fut même en son temps une source d’énergie électrique sur le vaisseau lunaire.
Mais alors, pourquoi ne pas l’avoir utilisé pour la voiture électrique, plutôt que des batteries qui s’essoufflent à la tâche ?
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La raison principale est que, jusqu’à présent, on ne connaissait pas de sources naturelles d’Hydrogène.
Il fallait donc (Il faut encore aujourd’hui) fabriquer cet Hydrogène, à grands frais pour les besoins de l’industrie, à partir d’hydrocarbures fossiles. Il n’y aurait donc eu aucun sens à utiliser ce gaz pour propulser une voiture, autant continuer avec l’essence et le gazole, dont le prix est dérisoire.
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Mais on peut aujourd’hui se procurer de l’Hydrogène vert à partir de l’électrolyse de l’électricité, produite en période de faible demande, par les installations solaires et éoliennes.
On peut donc ressortir la pile à Hydrogène et l’adapter à l’automobile.
Ce que font depuis plusieurs années tous les constructeurs, dans leurs bureaux d’études d’abord, puis sous forme de prototypes, et enfin sous forme de modèles de petite série comme la Toyota Mirai, et d'autres bientôt.
Ce changement de portage n’est pas sans problèmes:
Adapter le concept de pile à Hydrogène au cahier des charges de l’automobile requiert d’important travaux de recherche de matériaux, de fiabilisation, de sécurisation, et de réduction du coût.
Mettre au point des réservoirs capables d’emporter quelques Kg d’hydrogène sous une pression atteignant 700 Kg/cm2 n’a pas été simple, mais la technologie est prête et conforme aux exigences du marché.
Reste le problème du réseau de distribution capable de faire la plein en quelques minutes. Air Liquide a développé un concept de stations, destinée aujourd’hui au marché professionnel, mais qui peut être étendu aux besoins du transport particulier.
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La voiture électrique à Hydrogène apporte deux avantages décisifs:
- Le plein en quelques minutes.
- Une autonomie de plus de 600 Km.
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Mais il subsiste des obstacles à franchir pour en faire un outil grand public:
- Créer les conditions de l’acceptabilité d’une technologie qui conduit à manipuler un gaz combustible sous des pressions considérables.
- Installer des stations de remplissage en nombre suffisant.
- Développer la filière Hydrogène vert, sans lequel le projet n’aurait pas de sens.
- Vérifier que tout cela conduit à un prix de vente décent de ce nouveau carburant.
Du pain sur la planche…
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Les problèmes d’industrialisation et d’acceptabilité du combustible Hydrogène ne sont pas sous-estimés par les constructeurs.
D’autres filières sont explorées, notamment la fabrication de l’Hydrogène dans le véhicule à partir de Bioéthanol, beaucoup plus simple à transporter.
Le « vaporeformage » du bioéthanol est un procédé connu, qui a ici l’avantage d’utiliser un biocarburant. Cette réaction dégage du CO2 renouvelable, et peut donc être envisagée pour la voiture électrique.
La filière est à valider dans le cadre du cahier des charges automobile, extrêmement sévère.
Il se pose, entre autres, deux types de problèmes:
Le vaporeformage est une réaction catalytique endothermique. Le catalyseur doit être compatible avec le bioéthanol brut qui sera distribué à la pompe.
Les produits de réaction rejetés ne doivent comporter, en dehors du CO2, aucun résidu polluant .
Le rendement de la réaction doit être suffisant pour conserver un rendement global nettement supérieur à 50%.
Là aussi, du pain sur la planche.
La vie de la voiture électrique ne sera pas un long fleuve tranquille…
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