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16 mars 2021 2 16 /03 /mars /2021 09:58

 

Le Nucléaire, chasse gardée de l'Etat.

15 Mars 2021

Autrefois en France, avant l'ouverture du marché de l'électricité à la concurrence, le secteur de l'énergie électrique était coiffé par EDF depuis la production jusqu'à la distribution en passant par le transport et les échanges internationaux, le tout chapeauté par l'Etat, au même titre que les fonctions régaliennes.

Ce réseau électrique fut organisé autour de l'électronucléaire et de l'Hydroélectricité avec l'objectif de donner à la France son indépendance énergétique dans le secteur de l'énergie électrique.

Ce plan a parfaitement fonctionné, faut-il le rappeler.

Mais les temps ont changé.

La France n'est plus que l'un des vingt-sept pays de la Communauté Européenne, laquelle est essentiellement une communauté économique ( CEE ).

On sait que l'économie est de nos jours administrée suivant le principe de la concurrence pure et parfaite, principe devenu le cathéchisme auquel l'Europe a adhéré, chaque pays membre étant tenu de s'y conformer.

Les récalcitrants ne peuvent que se soumettre ou se démettre, ce que nos voisins d'outre-Manche ont fait récemment.

Notre pays n'ayant pas (pas encore) manifesté son intention de les imiter, nous sommes dans l'obligation de nous conformer au credo.

La Commission ayant pointé du doigt le caractère monopolistique de EDF, la France fut mise en demeure d'ouvrir son « marché » de l'électricité à la concurrence.

Mais petit problème : Pour vendre de l'électricité, il faut d'abord non seulement la fabriquer, mais aussi la produire à un coût compétitif.

Plusieurs moyens peuvent être utilisés pour obtenir de l'électricité afin d'en faire commerce :

Le premier consiste à la fabriquer soi-même. Mais pas question de bidouiller un réacteur nucléaire, c'est une technologie sensible que l'on ne doit pas mettre entre toutes les mains et qui nécessite des investissements colossaux hors de portée du premier venu. Pas question non plus de monter des centrales à combustibles fossiles, émettrices de CO2, au moment où le client exige du propre et du bien-pensant. Oubliés aussi les barrages hydroélectriques genre Génissiat, ce n'est plus l'époque.

Reste alors à faire appel au solaire, à l'éolien, et à la petite hydroélectrique.

Mais même ces technologies, que l'on prétend très bon marché tant qu'on n'y a pas touché, se révèlent onéreuses et peu propices à tailler des croupières au grand EDF.

En effet dans l'Industrie small n'est plus beautifull, il n'est que de voir la course à la puissance dans l'éolien pour comprendre que là se trouve les bonnes affaires.

(C'est là que l'on découvre  que la vocation de EDF a toujours été de fournir de l'énergie électrique au pays, alors que ses futurs concurrents ont surtout la vocation de faire du business).

Le second moyen consiste à acheter de l'électricité sur le marché de gros européen, un peu comme l'épicier achète des carottes à un grossiste. Mais les cours du MWh sont capricieux et l'on sait qu'il est très risqué de faire du business en revendant un produit dont on ne contrôle pas le coût d'approvisionnement. On peut y laisser beaucoup de plumes.

Et de toutes manières les quantités sont très limitées car le débit des échanges frontaliers est lui-même très limité.

De plus il faut ajouter un dernier obstacle : pour être adoubé fournisseur du réseau français il faut se soumettre aux conditions légales de la garantie du service public de l'électricité, ce qui impose le plus grand sérieux dans ses approvisionnements.

( Cette exigence n'a pas « encore » été levée par la Commission, mais cela peut venir...)

Aussi,un troisième moyen a-t-il été trouvé, assez farfelu, dont l'étrangeté en a « sponté » plus d'un :

Il s'agit simplement de s'emparer d'une partie de la production nucléaire de EDF pour un coût inférieur à son coût de revient, ce qui est évidemment un bon moyen de concurrencer le dit EDF.

C'est le dispositif ARENH, mis en place en 2011 (Loi Nome), qui restera dans l'Histoire comme exemple de piratage organisé par la Commission de Bruxelles au nom de la concurrence pure et parfaite.

Ce tour de bonneteau a laissé sans voix les opposants au nouveau système économique, tant la ficelle était grosse.

Cette ponction piratée s'élève au quart de la production nucléaire, et ceci jusqu'en 2025, et au moment où EDF doit investir des sommes colossales pour conformer les sites nucléaires aux nouvelles règles de sûreté post-Fukushima.

(Et il y en a qui, après cela, reproche à EDF sa dette « colossale » tout en appréciant ses tarifs parmi les plus bas d'Europe...).

Pour tenter de mettre un terme à cette gabegie, il y a trois possibilités :

La première consiste à mettre fin au dispositif ARENH, mais celui-ci ayant reçu force de Loi ( Loi Nome), son abrogation pure et simple devra passer par le Parlement, lequel ne sera pas forcément d'accord.

La deuxième consiste à augmenter le prix de cession du MWh nucléaire à sa vraie valeur. Je suggère de retenir la valeur souvent avancée par les opposants à cette technologie, chiche...

La troisième voix consiste à nationaliser le nucléaire* pour le mettre à l'abri du piratage, c'est le but principal du projet HERCULE qui rencontre évidemment une forte opposition. L'énergie produite par cette entité serait alors vendue aux fournisseurs d'électricité à un prix unique qui serait bien sûr le vrai prix.

* En y mettant aussi les grands barrages, sur lesquels la « concurrence » fonde de grands espoirs.

L'aboutissement, ou l'échec, de ce projet HERCULE, outre qu'il mettrait fin à une situation grotesque, sera l'occasion de savoir si l'Etat français possède encore un peu de pouvoir dans sa stratégie d'indépendance énergétique, ou si le réseau national est devenu le souk de Marrakech livré aux charmeurs de serpents...

 

 

 

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