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4 octobre 2014 6 04 /10 /octobre /2014 17:33

4 Octobre 2014

Parmi les objectifs annoncés par le Gouvernement pour la nouvelle politique énergétique figurent les deux déclarations suivantes:

- La part de la production électronucléaire dans le mix électrique sera réduite de 75% à 50% à l’horizon 2025.

- La puissance du parc électronucléaire sera plafonnée à sa valeur actuelle, soit 63,2 GWe. Le rapprochement de ces deux propositions n’est pas sans intérêt.

D’abord il nous faut dire un mot de la production électrique actuelle en France:

L’électronucléaire fournit la consommation de base, avec un parc constitué de 58 réacteurs en activité:

- 4 réacteurs de 1 450 MWe.

- 20 réacteurs de 1 300 MWe.

- 34 réacteurs de 900 MWe.

(L’unité MWe correspond à la puissance électrique disponible en sortie des alternateurs).

La puissance totale dégagée par la réaction de fission est environ trois fois plus importante mais, à cause du rendement de conversion de # 33% (Un réacteur électronucléaire est une machine à vapeur qui brûle de l’Uranium) seul le tiers de cette énergie est converti en électricité, le reste est de la chaleur perdue. Il est possible de récupérer une bonne partie de cette chaleur perdue et ainsi d’améliorer le rendement, c’est la cogénération. Mais elle n’est pas encore appliquée dans les centrales nucléaires, du moins en France.

La puissance électrique du parc installé est donc de # 63 GWe, donc théoriquement capable de produire 550 TWh sur une année si tous les réacteurs fonctionnaient simultanément sans interruption et à leur puissance nominale. (Il suffit de multiplier la puissance par le nombre d’heures d’une année). Mais cette valeur théorique n’est en fait jamais atteinte car sur les 58 installations il y en a en permanence au moins une demi douzaine qui sont mises à l’arrêt par roulement soit pour leur grande visite décennale, soit pour le remplacement du combustible, soit pour quelque autre raison technique liée à l’entretien ou à un incident. La puissance effectivement disponible à un moment donné est alors plutôt de 50 GWe environ en moyenne, variable selon le type des réacteurs indisponibles et selon la durée de l’arrêt.

Le coefficient d’utilisation Kp est actuellement de 80% , avec des variations de +/- 10% d’une année sur l’autre. (Les coréens atteignent paraît-il 85%, mais avec un parc beaucoup plus récent). Cette puissance de # 50 GWe, disponible théoriquement tout au long de l’année sans intermittence malgré quelques fluctuations, permet d’obtenir une production électronucléaire moyenne annuelle comprise entre 400 et 460 TWh bon an mal an. (L’électronucléaire c’est comme le vin, il y a des bonnes et des mauvaises années).

C’est ainsi qu’en 2010 la production électronucléaire fut de 408 TWh, alors qu’en 2011 elle a atteint 420 TWh, et 440 TWh en 2012, la nature et la gravité des causes d’arrêt étant variables d’une année sur l’autre. (Les mauvaises langues ajoutent que la production dépend également des budgets alloués à la maintenance, laquelle dépend beaucoup de l’âge des chaudières).

Lorsque la puissance appelée sur le réseau est inférieure à 50 GW, ce qui arrive couramment en milieu de journée et/ou la nuit, la production des réacteurs peut être réduite pour s’adapter à la baisse de la demande dans le cadre du régime de « suivi de charge » (Régime flexible), sauf si le marché extérieur est demandeur, auquel cas la puissance est maintenue et l’énergie excédentaire est exportée chez nos voisins, dans les limites imposées par le débits max des réseaux d’interconnexion transfrontaliers.

La production électronucléaire moyenne absorbée par la consommation interne de la France est donc, pour ces raisons techniques, toujours inférieure à la production effective des centrales, laquelle est elle-même dépendante du coefficient d’utilisation Kp et de la demande du marché frontalier.

Notons au passage que le plan de travaux d’amélioration de la sûreté des centrales, décidé à la suite de la catastrophe de Fukushima, entraînera certainement une baisse de la production électronucléaire sur plusieurs années à cause de l’arrêt prolongé de certaines installations pour modifications (sauf si l’EPR de Flamanville est mis en service rapidement et si Fessenheim voit sa durée d’exploitation prolongée).

EDF procède à la mise en place de moyens de production de substitution afin de pallier ce déficit temporaire, le premier impératif restant d’éviter d’avoir recours aux délestages non contractuels en périodes de pics de demande, la hantise étant évidemment le blackout, que nous avons frôlé de près un certain mois de Février 2012.

La demande interne d’électricité (la consommation finale) fluctue d’une heure à l’autre, d’un jour à l’autre, d’une saison à l’autre et d’une année à l’autre, entre 30 GW et pratiquement 100 GW certains jours d’hiver ( le cauchemar de EDF).

(ERDF fournit sur son site en direct et en temps réel la puissance demandée par le réseau).

Lorsque la demande instantanée dépasse la puissance nucléaire disponible, environ 50 GW, ce qui est très fréquent, l’électronucléaire ne peut plus suffire et il faut faire appel à d’autres sources:

L’hydroélectrique, qui fournit environ 10% de la production annuelle, permet de compenser une partie du déficit de puissance mais souffre d’intermittence saisonnière et dépend beaucoup de la pluviométrie. L’énergie fournie ne saurait dépasser les possibilités liées à la réserve d’eau, dont le renouvellement n’est jamais assuré. L’énergie stockée dans le réservoir d’un barrage est proportionnelle à la quantité d’eau, à la hauteur de chute disponible et au rendement de conversion.

Avec 1 m3 tombant de 1m, et un rendement de 80%, on peut obtenir 2,2 Wh, pas un de plus.

EDF possède en France métropolitaine 435 centrales hydroélectriques dont certaines équipées pour pratiquer le pompage-turbinage. La puissance installée cumulée est de 25 GW et l’énergie annuelle fournie est de 67 TWh en année moyenne, ce chiffre pouvant varier de +/- 30% selon la pluviométrie.

Il faut rappeler que la réserve d’eau des barrages est également un stock qui doit être géré en fonction d’impératifs divers comme la préservation d’un débit minimum des cours d’eau, les activités de loisir des plans d’eau, et que le niveau ne peut varier que dans certaines limites, et donc aussi la quantité d’énergie récupérable.

En complément de la production hydraulique, il existe des moyens de stockage d’énergie électrique constitués par un parc de STEP.

EDF possède 6 STEP principales ( Stations de Transfert d’Energie par Pompage) cumulant une puissance de 5 GW environ. Cette puissance est équivalente à celle de 5 réacteurs de 1000 MW, mais la réserve d’énergie correspondante est bien sûr limitée par la quantité d’eau disponible, qui reste relativement minime.

Ces STEP sont de deux types:

- Les STEP journalières, qui ne disposent que de quelques heures de réserve.

- Les STEP hebdomadaires, qui disposent de quelques dizaines d’heures avant épuisement.

Par ailleurs elles utilisent deux types de structures:

- Les STEP « pures » qui ne reçoivent aucun apport d’eau amont.

- Les STEP « mixtes » qui reçoivent l’apport gravitaire d’un cours d’eau.

Toutes ces installations sont utilisées d’une part pour stocker de l’énergie en période de faible demande, pour la restituer en période de pic de consommation, et d’autre part pour participer au réglage de fréquence et de tension du réseau. Les STEP sont donc des organes de régulation, elles ne participent pas à la production, leur rôle est celui d’un condensateur de filtrage dans un montage électronique. Elles sont appelées à jouer un rôle majeur dans la gestion du réseau d’électricité lorsque la part des énergies renouvelables intermittentes deviendra significative. La puissance hydroélectrique max actuelle de nos STEP (5 GW) ne suffira plus, et la réserve cumulée d’énergie devra être considérablement augmentée.

Les énergies éolienne et solaire ne représentent encore qu’une faible part du mix, de l’ordre de 10%, et leur croissance éventuelle est l’objet de la future stratégie de transition énergétique.

Leur intermittence en fait un moyen de production difficile à gérer sans une possibilité de stockage de masse de l’électricité. Le recours pour cette fonction aux barrages existants (pompage-turbinage), souvent évoqué, est une fausse solution qui consiste à déshabiller Pierre pour habiller Paul.

Les centrales thermiques constituent alors le seul moyen sûr et rapidement mobilisable contre la panne générale du réseau en cas de déficit de puissance momentané. En 2011 la puissance installée des centrales thermiques classiques était de 28 GWe , obtenus à partir de Charbon, Fioul, et Gaz.

1,3 GWe provenaient de centrales à combustibles renouvelables: Biomasse, Biogaz, déchets ménagers.

Lorsque, malgré la mobilisation de tous ces moyens, la puissance est insuffisante, en l’occurrence au-delà d’une puissance appelée de 90 GW environ, il faut importer de l’électricité. Ceci est réalisable grâce à un réseau d’échanges transfrontaliers dont le débit max est aujourd’hui limité à 8 GW environ, relativement faible. Ce débit max est en cours d’augmentation grâce à la construction de lignes nouvelles entreprise par EDF dans le cadre des accords européens.

Le tableau suivant présente le mix actuel disponible en période de pic de consommation:

Source Puissance installée Puissance disponible

Nucléaire 63 GW 50 GW

Hydraulique 25 25

Thermique 28 25

ENR 10 3

Pertes réseau et Auxiliaires -10

Total interne 126 GW 93 GW

Importations 8 GW 8 GW

Grand total 134 GW 101 GW

Si la puissance appelée sur le réseau dépasse #101 GW il devient nécessaire de procéder à des délestages.

EDF/RTE possède bien sûr un plan négocié pour ces délestages, en accord avec les pouvoirs publics, les collectivités locales, dans le cadre d’une réglementation stricte. Le réseau est divisé en zones dont certaines sont prioritaires, les délestages par zones se font par roulement afin de limiter la durée des coupures dans la mesure du possible. Les pics de consommation effectivement constatés ces dernières années sont très voisins de la limite actuelle, et les prévisionnistes de EDF prévoit une augmentation de ce paramètre dans le futur.

EDF a lancé récemment un « warning » prédisant des possibles délestages dès 2015 si des moyens supplémentaires ne sont pas mis en œuvre rapidement pour compenser la perte de production liée à l’arrêt de certains réacteurs.

Pour tenter d’éviter la saturation, EDF dispose de plusieurs voies: La première solution consiste à « lisser » la demande pour réduire les pics de puissance demandée. Pour cela la participation des clients est nécessaire puisque des contrats doivent être signés comportant des clauses d’effacement assorties d’avantages tarifaires. Le pilotage à distance de certains matériels gros consommateurs ( Lave-linge, Cumulus, charge de batterie, pompes à chaleur, etc…) nécessite un réseau « intelligent » (Smart Grid) dont le nouveau compteur Linky est un des maillons. Il s’agit d’un programme qui ne portera ses fruits que dans une ou deux décennies.

La deuxième voie réside dans un programme de réduction des pertes en lignes par une amélioration des infrastructures réseau.

En troisième lieu les capacités d’échanges transfrontaliers doivent être accrues, ce à quoi EDF s’emploie dès aujourd’hui.

La quatrième solution porte sur la limitation des besoins en énergie électrique par la promotion de mesures telles que l’adoption du chauffe-eau solaire, l’abandon du chauffage électrique à effet Joule, la généralisation des ampoules basse consommation, l’équipement en électroménager à hautes performances énergétiques, etc…

En cinquième lieu il sera procédé à la création de grilles tarifaires incitatives comme la tarification progressive ou le bonus-malus, voire même les quotas. Ceci étant davantage l’affaire du Gouvernement.

Enfin des moyens de production de relève devront être développés pour compenser l’intermittence des renouvelables, du moins tant qu’un procédé de stockage de masse de l’électricité ne sera pas réalisé. Ces moyens consisteront en un parc de centrales thermiques modernes fonctionnant au gaz ( Naturel puis Biogaz) et utilisant la cogénération.

Le développement des énergies renouvelables intermittentes rendra nécessaire l’accroissement des échanges transfrontaliers, le but étant de tendre vers un lissage de l’intermittence à l’échelon européen, au moins pour l’éolien. Le mix électrique actuel a permis de produire en 2012 une quantité d’énergie de 550 TWh ainsi répartis (source ERDF):

- Electronucléaire: 440 TWh

- Thermique (fossiles): 50

- Hydroélectrique: 50

- Eolien + PV: 10

TOTAL: 550 TWh

La consommation annuelle intérieure nette ( Energie finale, facturée au client) est de nos jours d’environ 440 TWh, avec une tendance à la stabilité depuis 2006. (Source SOeS, « chiffres clés de l’énergie 2012. » arrêtés à Février 2014).

La production électronucléaire est donc pratiquement égale à la demande interne.

Il peut paraître étrange dans ce cas de devoir faire appel à d’autres sources d’énergie, y compris fossiles, puisque l’électronucléaire à lui seul peut couvrir les besoins.

Comme nous l’avons montré plus haut, la raison de ce paradoxe tient dans le caractère hautement fluctuant de la demande de puissance qui peut varier de 30 à 100 GW alors que le parc nucléaire est limité à 50 GW par son coefficient de disponibilité (Kd) de 80%. En sorte que si le nucléaire est effectivement capable de produire annuellement une énergie suffisante pour égaler les besoins annuels cumulés, sa puissance disponible est insuffisante pour satisfaire la demande en période de forte consommation, typiquement au-delà de 50 GW.

Il est donc faux de prétendre que le nucléaire est en surcapacité, c’est en fait le contraire.

Cet argument de surcapacité, souvent avancé dans la presse, repose sur la confusion entre puissance et énergie. L’énergie est égale au produit de la puissance par le nombre d’heures de fonctionnement possible, il s’agit donc de deux notions différentes.

Le Nucléaire délivre une puissance relativement faible mais continue et sans intermittence, qui résulte en une énergie annuelle considérable à cause du nombre d’heures efficaces (8760).

Il en serait de même pour le thermique fossile, qui peut fonctionner toute l’année si nécessaire. En fait on n’y fait appel qu’en cas de nécessité à cause des émissions de CO2 .

Par contre l’hydroélectrique, dont la puissance est la moitié de celle du nucléaire, devrait pourvoir fournir une énergie annuelle de 220 TWh; or celle-ci ne dépasse pas 67 TWh les meilleures années à cause du nombre d’heures limité par la quantité d’eau disponible. Le coefficient de disponibilité est très faible, de l’ordre de 30% avec de grandes variations d’une année sur l’autre. Ici encore il ne faut pas confondre puissance et énergie.

Pour l’éolien c’est encore pire, on ne connaît ni la réserve de vent, ni sa force, ni le nombre d’heures de fonctionnement efficace, ni surtout les périodes d’absence de vent qui sont inopinées et de durée imprévisible. Il est alors impératif d’adosser cette énergie fantasque à un parc classique de relève de production capable de prendre le relais à très court terme et pendant des périodes qui peuvent être longues. Du moins tant que n’existera pas la possibilité du stockage de masse de l’énergie électrique.

Nous avons vu le rôle possible d’un parc dédié de STEP dans cette fonction. Leur multiplication pose des problèmes d’emprise foncière et d’acceptabilité par les populations. La filière Hydrogène est une autre voie possible, en cours d’expérimentation. ( Il s’agit de produire de l’Hydrogène par électrolyse en période de faible demande, et de le mélanger au gaz naturel distribué sur le réseau, en profitant des capacités de stockage existantes qui sont considérables, c’est le projet GRHYD).

Le solaire est également une énergie fluctuante, mais dont la production annuelle est prévisible dans une large mesure. Par contre l’absence de puissance nocturne impose également de disposer de moyens de relève.

Si le marché de la voiture électrique se développe comme prévu, la demande nocturne d’électricité augmentera considérablement, les moyens de relève devront être prévus en conséquence.

La production totale d’électricité de 550 TWh toutes énergies de réseau confondues, est une production brute en sortie des alternateurs, de laquelle il faut retirer les consommations auxiliaires du système:

- L’autoconsommation du cycle nucléaire, notamment les énormes pompes qui assurent la circulation de l’eau de refroidissement.

- L’autoconsommation des autres sources d’énergie électrique.

- L’énergie consommée pour le pompage-turbinage (1,6%) mis en œuvre pour stocker l’électricité produite en excédent par le nucléaire en période de faible demande.

- Les pertes en lignes du réseau de distribution, qui peuvent atteindre 10% selon ERDF.

Le total des pertes annuelle peut atteindre 60 TWh.

La production nette électrique est donc voisine de 490 TWh.

En période de faible demande interne, plutôt que de réduire la puissance des réacteurs, on préfère maintenir la puissance et vendre le surplus à l’export, soit environ 50 TWh en 2012 (solde positif des échanges transfrontaliers).

Il reste donc 440 TWh, qui constituent la consommation interne nette, qui se répartit ainsi selon les sources d’énergie:

- Nucléaire: 330 TWh

- Thermique (fossiles): 50

- Hydroélectrique: 50

- Eolien + PV: 10

TOTAL: 440 TWh

La part moyenne du nucléaire dans la consommation interne est donc en moyenne de 75%.

Aujourd’hui , dans une consommation d’énergie finale de 1 900 TWh, l’électricité ne représente que 23 %. Les programmes d’économies d’énergie porteront massivement sur les fossiles dont la part pourrait être réduite de moitié à l’horizon 2050, ce qui, avec le développement de l’éolien et du solaire, porterait la part de l’électricité à plus de 50% , voire même beaucoup plus à la fin du siècle. Certains prévisionnistes parlent de 60 à 70%.

Dans une stratégie de transition énergétique, le secteur de l’électricité doit donc jouer un rôle essentiel: De quelle quantité aurons-nous besoin et comment sera-t-elle produite ?

L’évolution de la consommation électrique dépend de nombreux paramètres: Les paramètres de réduction, tels que les incitations aux économies d’énergie, à l’abandon du chauffage électrique à effet Joule, à la promotion du chauffe-eau solaire, et les progrès dans la recherche de l’efficacité énergétique des matériels en général, seront compensés par les paramètres d’augmentation tels que la croissance naturelle du nombre des ménages, la demande de confort, le développement de la voiture électrique et des pompes à chaleur.

On peut penser que globalement la consommation restera plus ou moins stable autour de 500 TWh à l’horizon 2025, mais ce n’est qu’une hypothèse.

Durant les prochaines décennies, et selon l’évolution du coût des énergies de réseaux, le secteur de l’autosuffisance énergétique se développera grâce au solaire thermique et photovoltaïque, au petit éolien, à la micro cogénération, soulageant ainsi les capacité appelées sur les réseaux et contribuant à la maîtrise de la production nationale de réseau.

L’hypothèse d’une réduction drastique le la consommation d’électricité de réseau est hautement improbable et n’est d’ailleurs pas retenue par EDF dans les prévisions d’évolution de consommation. Ses prévisionnistes tablent sur une croissance de la demande de 0,6% par an jusqu’en 2030, soit 550 TWh à cette échéance.

En 2025, et sur la base d’une consommation finale de 500 TWh, la production électronucléaire ne devrait pas dépasser 250 TWh pour respecter l’objectif de 50% fixé par le gouvernement .

Il faudrait donc arrêter environ 25 réacteurs pour réduire la production électronucléaire à la valeur fixée.

Or ce Gouvernement a bien précisé qu’aucun réacteur ne sera arrêté durant le présent quinquennat. Aucune procédure n’est d’ailleurs engagée à ce sujet, pas même pour Fessenheim. Bien au contraire, la durée d’exploitation des réacteurs va être prolongée de dix ans selon toute vraisemblance. Lorsque cette prolongation sera actée, le programme contractuel d’arrêt deviendra le suivant:

5 réacteurs à arrêter entre 2027 et 2030

23 réacteurs à arrêter entre 2031 et 2035 Etc…

Il n’y aura donc officiellement aucune baisse de la production électronucléaire d’ici 2027 . (L’engagement de plafonner la puissance du parc électronucléaire à sa valeur actuelle de 63 GW n’est accompagné d’aucun programme de réduction ultérieure de cette capacité). En 2025 la part de la production électronucléaire dans le mix électrique demeurera donc inchangée, à 75%.

De qui se moque-t-on ?

La cour des comptes, dans son rapport de synthèse sur l’électronucléaire, déplore d’ailleurs cette contradiction et souhaite davantage de consistance dans le programme stratégique de transition énergétique.

Après prolongation de dix ans de la durée d’exploitation, l’objectif de réduction à 50% de la part du nucléaire ne serait atteint au mieux qu’en 2035, soit dans 21 ans et non pas dans 11 ans. Et à condition qu’aucun réacteur nouveau ne soit mis en service, ce qui suppose l’arrêt du programme EPR et des recherches sur la génération IV, ce qui n’est pas dans les projet de ce Gouvernement, bien au contraire.

Engager une transition énergétique sur des bases aussi fantaisistes relève d’une légèreté qui ne peut qu’engendrer la méfiance vis-à-vis du programme de développement des énergies durables et donc des investissements correspondants.

En effet à quoi bon produire de l’électricité verte tant que la production électronucléaire de base reste disponible et encouragée par l’Etat ? Le seul intérêt de produire aujourd’hui de l’électricité éolienne ou solaire réside alors dans l’effet d’aubaine créé par l’obligation faite à l’opérateur national de racheter cette production à un tarif exorbitant chargé ensuite sur la facture du consommateur à travers les taxes, créant un effet pervers insoutenable à long terme.

Cette situation est évidemment voulue par le Gouvernement, qui voit dans cet effet d’aubaine une occasion de créer un outil industriel et de démarrer une production qui pourrait, le moment venu, prendre le relais du nucléaire à partir de 2030, dans l’hypothèse d’une décision de retrait quel qu’en soit le motif.

Et si le développement de la production d’électricité verte n’atteint pas son objectif, il sera toujours temps de prolonger l’exploitation de l’électronucléaire en remplaçant les vieux réacteurs par des EPR, pour prendre le relais dès 2030. D’ici là le programme industriel EPR aura été mis sur les rails à Flamanville et ailleurs dans le monde, du moins ses promoteurs l’espèrent.

Voilà un bel exemple de « réal politique » , aux antipodes de la politique fiction qui nous est servie journellement pour accommoder la cuisine politicienne malodorante.

Mais ne désespérons pas, selon le nouveau calendrier d’exploitation des INB ( Installations Nucléaires de Base) le programme d’arrêt définitif des plus anciens réacteurs démarrera au mieux en 2027. D’ici là trois quinquennats seront passés ( 2017, 2022, et 2027) et la politique énergétique de la France aura subi bien des révisions. Sans compter avec un éventuel accident nucléaire sur le territoire, ce qui bouleverserait la donne bien évidemment, et n’est souhaité par personne, du moins on peut l’espérer…

Une seule certitude: la promesse de réduction de la part du nucléaire de 75% à 50% à l’horizon 2025 est fantaisiste dans le cadre actuel de l’action de ce Gouvernement (ou plutôt de son inaction).

Pour lui redonner un peu de crédibilité il faudrait au moins:

- Rejeter la proposition de prolongation de 10 ans de la durée d’exploitation des INB.

- Programmer dès aujourd’hui le planning d’arrêt prévu initialement, c’est-à-dire arrêter 5 réacteurs entre 2017 et 2020, puis 23 réacteurs supplémentaires entre 2021 et 2025, et les autres ensuite selon le planning contractuel révisé.

- Bien évidemment stopper le programme EPR .

- Lancer le programme de croissance de la production éolienne et solaire destinée à remplacer le nucléaire en baisse.

- Lancer le programme de développement des centrales à gaz de compensation de l’intermittence du solaire et de l’éolien. (Un parc important de solaire et/ou d’éolien ne servirait à rien s’il n’était pas accompagné d’un parc de production pour la relève de l’intermittence).

- Lancer un programme de développement d’installations de stockage de l’électricité.

- Mettre en place le programme de démantèlement qui doit normalement commencer dès l’arrêt définitif des premiers réacteurs.

La production électronucléaire tomberait alors à 250 TWh en 2025. La demande électrique interne, qui n’aurait aucune raison se changer pour s’adapter à une telle décision politique, serait toujours de 500 TWh en et la part de l’électronucléaire serait bien de 50%.

L’objectif du Gouvernement serait ainsi atteint.

Pour cela il suffit donc d’appliquer le programme initial de limitation à 40 ans de la durée d’exploitation des réacteurs et bien sûr ne pas en construire de nouveaux !!

Certes, mais il faudra trouver ailleurs les 250 TWh manquants.

Aujourd’hui, pour répondre à la demande intérieure, on fait appel aux énergies fossiles et aux énergies renouvelables pour produire les 110 TWh nécessaires en complément du nucléaire. En 2025, et dans l’hypothèse du respect du calendrier initial d’arrêt des réacteurs, ce n’est plus 110 TWh qu’il faudra trouver en complément, mais bien 250, et bien davantage par la suite, car la réduction à 50% de la part du nucléaire ne serait évidemment qu’une étape, le contraire serait absurde.

Où est le programme de développement de l’éolien et du solaire qui permettrait de relever ce défi ? (L’Hydraulique est quasiment déjà saturé) Actuellement l’éolien et le solaire fournissent moins de 10% de l’électricité consommée. Demain, si le nucléaire est réduit à 50%, il faudra compenser par 200 TWh de solaire et d’éolien, ce qui nécessite une croissance de plus de 15% par an si l’échéance est à 2025. On n’en prend pas le chemin.

Mais on peut aussi remplacer l’électronucléaire en baisse par des centrales à gaz, qui seront de toutes façons nécessaires plus tard pour compenser l’intermittence de l’éolien et du solaire. Et n’oublions pas le charbon, très abondant et bon marché …

Peut-être faudra-t-il alors faire appel au Gaz de schiste si la situation internationale du marché du pétrole et du Gaz naturel devenait tendue. (La situation actuelle ne porte pas à l’optimisme…).

Faut-il vraiment préférer cette solution qui imposerait d’augmenter la part des énergies fossiles dans la production électrique pour compenser un nucléaire en voie de disparition ?

Il est probable que les gouvernements qui se succéderont d’ici 2025 et au-delà seront tentés de ne pas baisser la production électronucléaire, du moins tant que les énergies renouvelables n’auront pas apporté la preuve qu’elles sont capables de la remplacer, en quantité et en coût de production. Encore un conflit entre la poule et l’œuf…

Voici donc quel pourrait être le scénario électrique le plus vraisemblable pour la prochaine décennie:

- Prolongation de dix ans de la durée d’exploitation des réacteurs nucléaires en service, sauf deux ou trois qui seront aussitôt remplacés par l’EPR mis en service en 2018. La production électronucléaire resterait inchangée, avec une part de 75% dans le mix électrique pour assurer la production de base.

- remplacement progressif des anciens réacteurs par des EPR.

- Croissance modérée de la production éolienne et solaire, conditionnée par le maintien de l’effet d’aubaine de l’obligation d’achat de la production à un prix avantageux. ( Tant que le nucléaire existe il n’y a nul besoin d’éolien ou de solaire en quantité, car leur intermittence serait plutôt une gène ).

- Développement du parc de centrales à Gaz à cogénération couplées à des réseaux de chaleur.

- Campagne d’incitation aux économies d’électricité pour tenter de plafonner la consommation intérieure à 500 TWh, notamment en remplaçant l’électricité par le gaz dans le chauffage des bâtiments, en faisant la promotion du chauffe-eau solaire, et en soutenant le développement de la fameuse voiture à deux litres aux cent qui sera donc une hybride.

La récente proposition de loi sur la transition énergétique reste suffisamment vague pour autoriser toutes les hypothèses.

Pour connaître la stratégie nucléaire d’après 2025, on est prié d’adresser le courrier au prochain président de la République. Ou de s’informer directement auprès des directions de la communication de EDF et AREVA. ( jusqu’à présent il n’a pas été question d’interrompre les travaux sur la mise au point des réacteurs de génération IV…).

Ou en dernier ressort, consulter madame Irma.

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